La pandémie de coronavirus a forcé le monde à s’adapter, créer toute une série de mesures pour endiguer l’épidémie, se confiner, puis à se déconfiner, se réadapter, et se reconfiner.
Cet article s’intéressera à deux aspects des distances sanitaires et sociales : le premier, c’est la réponse des gouvernements pour freiner l’épidémie, le second est l’aspect anthropologique de la distance chez l’homme.
La distanciation sociale
Les autorités ont en même temps analysé le virus, sa manière de se comporter et de se transmettre, et imposé des mesures de distance sanitaire, appelées mesures de distanciation sociale, afin d’endiguer la contamination. Avec plus ou moins de succès.
La pandémie de COVID-19 a donc forcé les gouvernements du monde entier à mettre en œuvre des politiques de distanciation physique et de verrouillage social (mises en quarantaine) destinées à inhiber la propagation du coronavirus en limitant les déplacements et les activités quotidiennes de milliards de personnes.
Ces mesures diffèrent en fonction des pays mais se ressemblent globalement : le port du masque, si il n’est pas obligatoire est recommandé, et une distance entre 1 et 2 mètres entre les individus. Ajoutons la ventilation des espaces clos.
Afin d’aider les citoyens à maintenir ces mesures, de nombreuses techniques de par le monde ont été mises en œuvre. A Singapour, le gouvernement a installé des balises de sécurité délimitant l’espace dans lequel les citoyens peuvent s’asseoir. En Belgique, certains supermarchés imposent l’utilisation du caddie (même pour acheter une salade !) afin de forcer la distance. D’autres magasins ont recours au fameux poteau de balisage pour limiter les déplacements, créer des séparations dans l’espace, et permettre d’éviter aux individus de se croiser. En Thaïlande, c’est le bouclier des forces de l’ordre qui permet de maintenir des distances de sécurité dans les foules. Dans de nombreux pays comme l’Australie ou certains états des États-Unis, les messes se donnent en drive-in. Dans le monde du journalisme et des médias, des charlottes ont vu leur apparition pour protéger les micros des postillons. De nombreux pays ont recours au marquage sur le sol pour délimiter les zones d’espace dans lesquelles les clients des magasins peuvent évoluer.
De manière plus triviale dans les toilettes publiques, un urinoir sur deux est condamné ou encore au Japon, des restaurants ont investi dans des mannequins en plastique pour condamner des tables mais donner une impression de convivialité.
Toutes ces mesures ont quelque chose en commun, ce sont nos antécédents culturels qui influencent notre perception de l’espace. C’est que l’on appelle le domaine de la proxémique, soit l’étude du comportement et les sentiments des êtres humains dans différents espaces. L’anthropologue Edward T. Hall, dans son ouvrage La Dimension cachée, s’intéresse à l’éthologie (l’étude du comportement) et plus précisément à la manière dont l’homme régule et utilise l’espace. Dans cet ouvrage, il indique que l’homme dans sa perspective anthropologique présente des distances intimes, personnelles, mais aussi sociales et publiques.
Les distances intime, personnelle, sociale et publique chez l’être humain
Une des observations majeures de Hall est que la distance physique qui s’établit entre deux (ou plusieurs) personnes en interaction varie en fonction des cultures. Il en tire donc l’hypothèque que dans les pays nordiques ou au Japon, les distances physiques entre deux individus sont importantes et les contacts assez rares, tandis qu’en Afrique, elles sont plus réduites et les contacts physiques plus fréquents. Dans les pays latins, les distances physiques sont également réduites.
De ses observations, Edward T. Hall détermine quatre type de distances chez l’homme, les distances : intime, personnelle, sociale, et publique. Chacune de ces distances comporte deux modes, le proche et le lointain :
- distance intime : moins de 40 cm de soi (proche : – de 15 cm, éloigné : entre 15 et 40 cm)
- distance personnelle : de 45 cm à 125 cm de soi (proche : de 45 à 75 cm, éloigné : de entre 75cm et 125cm)
- distance sociale : entre 120cm et 360cm de soi (proche : entre 120cm et 210cm, éloigné : entre 210cm et 360cm)
- distance publique : plus de 360cm de soi (proche : de 360cm à 750cm, éloigné : plus de 750cm)
Suite à ses observations, il émet, par exemple, l’hypothèse que les Allemands ont généralement besoin d’une plus grande bulle personnelle que les Américains et que les Japonais sont capables de supporter les espaces encombrés plus que la plupart des Occidentaux.
Ses recherches soulignent le fait que les traditions collectives façonnent la manière dont les populations calculent leur relation avec les personnes et les objets. Ses travaux sont plus que jamais actuels pour comprendre la manière dont les gouvernements ont pensé le virus et la manière de limiter sa propagation.
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