Les fromages (5/5) : pâte à pâte

La France produit plus de 1 200 variétés de fromages différentes, ce qui en fait le pays champion mondial de la diversité fromagère. Cette extraordinaire richesse repose sur des siècles de savoir-faire artisanal et sur une compréhension fine des processus de transformation du lait. Pourtant, derrière cette immense variété se cachent des techniques de fabrication communes et une classification relativement simple basée sur les types de pâtes.

Sommaire de l'article :

Comprendre comment est fabriqué un fromage et savoir identifier les grandes familles de pâtes fromagères, c’est accéder aux secrets de cet art culinaire millénaire qui fait la fierté gastronomique française. Que vous soyez amateur de fromages, étudiant en école hôtelière ou simplement curieux de gastronomie, ce guide vous permettra de décrypter l’univers complexe mais fascinant de la fromagerie.

⚡ En bref : Fabrication et types de pâtes de fromage

Cinq étapes fondamentales pour fabriquer un fromage : 1) Caillage (coagulation du lait sous l’action de ferments ou présure), 2) Moulage (mise en forme définitive), 3) Égouttage (extraction du lactosérum/petit-lait), 4) Salage (au sel sec ou en saumure), 5) Affinage (maturation sous l’action de micro-organismes). Ces étapes peuvent durer de quelques jours (fromages frais) à plusieurs années (fromages de garde).

Cinq grandes familles de pâtes : pâtes fraîches (non affinées, conservation quelques jours : fromage blanc, petit-suisse), pâtes molles (affinage court, pas de pressage ni chauffage : camembert, brie, munster), pâtes pressées cuites ou non (affinage moyen à long : comté, beaufort, cantal, morbier), pâtes persillées (moisissures bleues injectées : roquefort, bleu d’Auvergne), pâtes dures (pressées et chauffées, garde de plusieurs années : parmesan, gruyère suisse). La classification repose sur deux paramètres : pH et activité de l’eau.

Moyens mnémotechniques : pour retenir les 5 étapes de fabrication, pensez à la rime en « -AGE » : Caill-AGE, Moul-AGE, Égoutt-AGE, Sal-AGE, Affin-AGE. Toutes les étapes se terminent par le même son, ce qui facilite la mémorisation dans l’ordre chronologique.

Les 5 étapes fondamentales de la fabrication du fromage

Après avoir découvert les nombreux et différents fromages de toute la France (Nord, Centre, Est et Sud), voici maintenant un nouvel article concernant deux thèmes particuliers, à savoir : les différentes pâtes qui caractérisent les fromages, et les étapes fondamentales pour créer de BONS fromages !

La fabrication du fromage est un processus ancestral qui transforme le lait (de vache, chèvre, brebis ou bufflonne) en un produit conservable aux saveurs complexes. Quelle que soit la variété finale, tous les fromages passent par cinq étapes essentielles qui constituent le socle commun de la fromagerie traditionnelle et industrielle.

Infographie des 5 étapes de fabrication du fromage : 1. Caillage (coagulation du lait par ferments ou présure), 2. Moulage (mise en forme), 3. Égouttage (extraction du lactosérum), 4. Salage (sel sec ou saumure), 5. Affinage (maturation en cave). Flèches reliant chaque étape chronologiquement.
es cinq étapes chronologiques de la fabrication du fromage : caillage (coagulation du lait), moulage (forme définitive), égouttage (extraction du petit-lait), salage (conservation et goût), affinage (maturation sous l’action de micro-organismes). Processus universel applicable à tous les fromages. Infographie originale JeRetiens.

1. Le caillage (coagulation)

Tout d’abord, le lait coagule sous l’action de ferments lactiques ou de présure. Cette première étape, appelée caillage ou coagulation, consiste à transformer le lait liquide en une masse semi-solide appelée caillé. Deux méthodes principales existent :

La coagulation lactique : des bactéries lactiques (ferments) acidifient le lait en transformant le lactose en acide lactique. Cette acidification fait précipiter les protéines du lait (caséines) qui s’agglomèrent. Ce processus lent (12 à 24 heures) est utilisé pour les fromages frais et certains fromages de chèvre. Le caillé obtenu est fragile, poreux et acide.

La coagulation présure : on ajoute de la présure (enzyme extraite traditionnellement de la caillette des jeunes ruminants, aujourd’hui souvent d’origine microbienne ou végétale) qui fait coaguler les caséines en 30 à 60 minutes. Cette méthode rapide produit un caillé élastique et compact utilisé pour la majorité des fromages (pâtes pressées, molles à croûte fleurie ou lavée).

De nombreux fromages combinent les deux méthodes (coagulation mixte) pour obtenir un équilibre optimal entre acidité et texture. La température du lait lors du caillage (28-35°C généralement) et la quantité de ferments/présure ajoutés influencent profondément les caractéristiques du fromage final.

2. Le moulage

Puis on réalise le moulage qui donnera au fromage sa forme définitive. Une fois le caillé formé, il est découpé en petits cubes (de quelques millimètres à plusieurs centimètres selon le type de fromage) pour faciliter l’évacuation du lactosérum. Le caillé découpé est ensuite transféré dans des moules qui détermineront la forme finale du fromage : cylindrique (camembert, crottin), rectangulaire (pont-l’évêque, maroilles), meule (comté, beaufort), pyramide (pouligny-saint-pierre), cœur (neufchâtel), etc.

Le moulage peut être manuel (pour les fromages artisanaux) ou mécanique (production industrielle). Les moules traditionnels sont en bois, osier ou faïence ; les moules modernes sont en plastique alimentaire perforé permettant l’égouttage. Cette étape est cruciale car elle détermine non seulement l’aspect esthétique mais aussi le rapport surface/volume qui influence l’affinage ultérieur.

Pour certains fromages à pâte pressée, le moulage s’accompagne d’un pressage mécanique qui accélère l’égouttage et compacte le caillé. La pression exercée varie de quelques kilogrammes (saint-nectaire) à plusieurs tonnes (comté, gruyère) et peut durer de quelques heures à plusieurs jours.

3. L’égouttage

Ensuite on procède à l’égouttage : le lactosérum (petit-lait, liquide jaunâtre riche en protéines solubles, lactose et minéraux) est extrait du coagulum. Le caillé se rétracte et se durcit progressivement pour donner une masse pâteuse plus ou moins ferme.

L’égouttage peut être spontané (par gravité, pour les pâtes molles et fraîches, durant 12 à 48 heures) ou accéléré par pressage (pour les pâtes pressées). Plus l’égouttage est poussé, plus le fromage sera sec et dense. Un fromage frais conserve environ 80% d’humidité, une pâte molle 50-55%, une pâte pressée 40-45%, une pâte dure 30-35%.

Le lactosérum récupéré n’est pas un déchet : il est utilisé pour produire la ricotta italienne (fromage de lactosérum), alimenter les porcs en élevage, fabriquer des compléments protéinés (whey protein pour les sportifs), ou encore comme engrais agricole. En France, 2 millions de tonnes de lactosérum sont produites annuellement lors de la fabrication fromagère.

Durant l’égouttage, le fromage est retourné plusieurs fois pour assurer une évacuation homogène du petit-lait et éviter les déformations. Pour certains fromages (comté, beaufort), le caillé est également chauffé durant cette phase (40-54°C) pour accentuer l’expulsion du lactosérum et donner une texture plus ferme.

4. Le salage (ou saumurage)

Le caillé égoutté est ensuite salé. Le salage remplit plusieurs fonctions essentielles : il rehausse les saveurs, favorise la formation de la croûte, ralentit le développement des micro-organismes indésirables (fonction conservatrice), régule l’activité enzymatique durant l’affinage, et extrait l’eau résiduelle du fromage (effet osmotique).

Deux méthodes principales existent :

Le salage au sel sec : on frotte la surface du fromage avec du gros sel ou on saupoudre le caillé avant moulage. Cette méthode est utilisée pour les pâtes pressées (comté, cantal, salers) et certains fromages de chèvre. Le salage se fait en plusieurs passages sur 2 à 5 jours. Le sel pénètre progressivement par diffusion.

Le saumurage : le fromage est immergé dans une saumure (eau saturée en sel à 18-22%) pendant quelques heures à plusieurs jours selon la taille. Cette technique, plus rapide et homogène, est privilégiée pour les pâtes molles (camembert, brie) et les grandes meules (gruyère, emmental). La température du bain (10-14°C) et sa durée déterminent la teneur finale en sel.

La teneur en sel des fromages varie considérablement : 0,5% pour les fromages frais non salés, 1,5-2% pour les pâtes molles, 2-3% pour les pâtes pressées, jusqu’à 4-6% pour le roquefort. Un fromage trop salé masque les saveurs ; pas assez salé, il risque l’altération microbienne.

5. L’affinage (période de maturation)

Enfin on passe à l’affinage, la période de maturation où la pâte est transformée sous l’action de micro-organismes (bactéries, levures, moisissures) et d’enzymes naturellement présentes. L’affinage se déroule en cave d’affinage où température (8-16°C selon le type), hygrométrie (85-95%) et aération sont rigoureusement contrôlées.

Durant cette phase magique, des réactions biochimiques complexes se produisent : protéolyse (dégradation des protéines en acides aminés et peptides), lipolyse (dégradation des lipides en acides gras libres), fermentation résiduelle. Ces transformations développent les arômes, modifient la texture (qui s’assouplit progressivement), et font évoluer la couleur et l’aspect.

La durée d’affinage varie considérablement : aucune pour les fromages frais, 2-4 semaines pour les pâtes molles à croûte fleurie (camembert), 6-8 semaines pour les pâtes molles à croûte lavée (munster, époisses), 2-4 mois pour certaines pâtes pressées (tomme, morbier), 4-12 mois pour les comtés et beauforts jeunes, 18-36 mois pour les comtés et parmesans extra-vieux, jusqu’à 4-5 ans pour certains cheddars anglais.

Pendant l’affinage, le fromager intervient régulièrement : retournement des fromages, brossage ou lavage de la croûte (pâtes lavées), perçage pour les pâtes persillées (introduction d’air permettant le développement du penicillium roqueforti), contrôle de la température et de l’humidité. L’art de l’affineur réside dans sa capacité à accompagner la maturation pour révéler le meilleur de chaque fromage.

Moyen mnémotechnique pour retenir les 5 étapes

Dans l’ordre on a : la coagulation (caillage), le moulage, l’égouttage, le salage (ou saumurage), et enfin l’affinage (période de maturation).

Il suffit donc de retenir : 1) Caillage 2) Moulage 3) Égouttage 4) Salage 5) Affinage !

L’astuce est simple : toutes les étapes se terminent par le son « -AGE », ce qui crée une rime mnémotechnique facile à mémoriser. On peut aussi retenir l’acronyme CMÉSA (Caillage, Moulage, Égouttage, Salage, Affinage), même s’il est moins poétique que la succession des rimes.

caillage_moulage_égoutage_salage_affinage

Les 5 grandes familles de pâtes de fromage

On peut décomposer les fromages en 5 grandes catégories en fonction des deux paramètres essentiels de la conservation des aliments : le pH (acidité) et l’activité de l’eau (quantité d’eau disponible pour les micro-organismes). Ces deux facteurs déterminent la texture, le goût, la durée d’affinage et la capacité de conservation des fromages.

1. Les pâtes fraîches : fromages non affinés

Les fromages à pâtes fraîches ne sont pas affinés ou très peu (quelques jours maximum). Leur durée de conservation est de quelques jours (5-7 jours maximum) à température ambiante, et 2-3 semaines au réfrigérateur. Ils contiennent 70-82% d’eau, ce qui leur donne une texture molle, crémeuse, onctueuse.

Ces fromages résultent d’une coagulation essentiellement lactique (acide), avec peu ou pas de présure. L’égouttage est spontané et peu poussé. Aucun affinage n’est nécessaire : le fromage est prêt à la consommation dès la fin de l’égouttage. Le pH est bas (4,5-5,0), ce qui leur donne une saveur légèrement acidulée caractéristique.

Exemples : fromage blanc (faisselle, fromage frais nature), petit-suisse, demi-sel, fontainebleau, cervelle de canut (spécialité lyonnaise), brousse (Provence), brocciu corse (AOP), mascarpone italien, ricotta italienne (techniquement un fromage de lactosérum), cottage cheese anglo-saxon.

Les fromages frais peuvent être nature ou aromatisés (herbes, ail, poivre). Ils sont riches en protéines (8-20% selon l’égouttage), calcium, et présentent une digestibilité excellente grâce à leur acidité qui prédigère partiellement les protéines. Cependant, leur conservation limitée les rend fragiles : la chaîne du froid doit être respectée scrupuleusement pour éviter tout risque sanitaire.

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2. Les pâtes molles : camembert, brie, munster

Le terme pâte molle s’applique à un fromage qui ne subit au moment de sa fabrication ni chauffage, ni pressage. La pâte est alors onctueuse voire coulante à pleine maturation du fromage. Les fromages à pâtes molles sont affinés durant une période relativement courte (2 à 8 semaines selon les variétés), les plus connus sont le Camembert et le Brie, mais il en existe bien d’autres (l’Époisses, le Munster, le Reblochon, le Pont l’Évêque, le Livarot).

On distingue deux sous-catégories principales :

Pâtes molles à croûte fleurie : la surface est recouverte d’un duvet blanc constitué de moisissures nobles (Penicillium candidum ou camemberti). Ces moisissures se développent naturellement en cave d’affinage et contribuent à l’affinage de l’extérieur vers l’intérieur. La pâte évolue de crayeuse à fondante. Exemples : camembert de Normandie (AOP), brie de Meaux et de Melun (AOP), coulommiers, chaource (AOP), saint-marcellin, brillat-savarin (triple-crème à 75% de matière grasse).

Pâtes molles à croûte lavée : durant l’affinage, la croûte est régulièrement lavée (d’où le nom) avec de l’eau salée, parfois additionnée d’alcool (bière, marc, vin) ou d’épices. Ce lavage favorise le développement de bactéries d’affinage (Brevibacterium linens notamment) qui donnent à la croûte sa couleur orangée caractéristique et son odeur puissante. Ces fromages développent des arômes intenses, parfois jugés « forts » par les non-initiés. Exemples : époisses (AOP), munster (AOP), maroilles (AOP), livarot (AOP), pont-l’évêque (AOP), langres (AOP), reblochon (AOP), vacherin mont-d’or (AOP saisonnière).

Les pâtes molles contiennent 45-55% d’eau et 20-28% de matière grasse (sur produit fini). Leur texture crémeuse et leur diversité aromatique (de doux et lacté à puissant et animal) en font une famille particulièrement appréciée des amateurs français.

camembertMunster

3. Les pâtes pressées : comté, cantal, morbier

Les fromages à pâtes pressées subissent un affinage durant une période assez longue, soit quelques semaines pour le Saint-Paulin, 2 à 3 mois pour les tommes, morbier et cantal, et un peu plus d’un an pour le salers et la laguiole, en cave humide.

Cette famille se subdivise en deux catégories :

Pâtes pressées non cuites : après le caillage, le caillé est découpé, brassé, puis moulé et pressé mécaniquement pour évacuer un maximum de lactosérum, mais sans chauffage. L’affinage dure 1 à 6 mois généralement. La pâte est souple, fondante, avec parfois des petits trous irréguliers. Exemples : saint-nectaire (AOP), cantal jeune à vieux (AOP), salers (AOP, production estivale uniquement), laguiole (AOP), tommes de Savoie, morbier (AOP avec sa raie noire centrale de charbon végétal), bethmale, reblochon (AOP), raclette, mimolette jeune, ossau-iraty (AOP, au lait de brebis).

Pâtes pressées cuites : le caillé est chauffé à 50-56°C pendant le brassage (cuisson), ce qui accentue l’expulsion du petit-lait et donne une pâte très ferme. Après moulage et pressage vigoureux (plusieurs tonnes), l’affinage dure de 4 mois minimum à 36 mois et plus. Ces fromages développent une complexité aromatique exceptionnelle avec le temps (fruité, notes de noisette, caramel). Exemples : comté (AOP, 4-36 mois d’affinage), beaufort (AOP, 5-24 mois), gruyère français et suisse (AOP), emmental français (IGP) et suisse, abondance (AOP).

Les pâtes pressées contiennent 35-45% d’eau et constituent d’excellents fromages de garde. Les grandes meules de comté ou beaufort (40-70 kg) nécessitent 400-500 litres de lait pour leur fabrication. Ces fromages sont riches en calcium, protéines et vitamine A, et représentent une source énergétique importante (350-420 kcal/100g).

MorbierCantal

4. Les pâtes persillées : roquefort et fromages bleus

Les pâtes persillées (fromages bleus) possèdent une couleur bleue-verte qui est due à l’injection ou l’ensemencement d’une moisissure noble, le Penicillium roqueforti ou Penicillium glaucum, qui persille (marbre) la pâte de veines caractéristiques, délivrant un arôme puissant et une saveur prononcée légèrement piquante.

Le processus de fabrication est spécifique : après le caillage et le moulage, le fromage est ensemencé avec les spores de penicillium (traditionnellement obtenues à partir de pain de seigle moisi). Quelques jours après, le fromage est percé de part en part avec de longues aiguilles pour créer des galeries d’aération. L’oxygène pénètre par ces trous et permet le développement de la moisissure bleue à l’intérieur de la pâte. L’affinage dure 3 à 9 mois en cave humide et fraîche.

Les pâtes persillées développent des arômes intenses : notes de champignon, de sous-bois, de noisette, avec une pointe de piquant caractéristique due à la lipolyse (dégradation des lipides). La texture est crémeuse à friable selon la variété et la maturité.

Les plus connus sont le Roquefort (AOP, au lait de brebis, affiné dans les caves naturelles de Roquefort-sur-Soulzon), le Bleu d’Auvergne (AOP), la Fourme d’Ambert (AOP, plus douce), la Fourme de Montbrison (AOP), le Bleu de Gex (AOP), le Bleu du Vercors-Sassenage (AOP), le Bleu des Causses (AOP).

À l’international : le Gorgonzola (AOP italienne, de Lombardie et du Piémont, doux ou piquant), le stilton bleu (fromage anglais du Derbyshire, Leicestershire et Nottinghamshire), le Cabrales espagnol (des Asturies), le Danablu danois.

Les fromages bleus sont riches en calcium, protéines et contiennent des probiotiques bénéfiques pour la flore intestinale. Leur saveur puissante les rend parfaits pour cuisiner (sauces, salades) ou accompagner un bon vin doux (Sauternes, Porto).

roquefortFourme d'Ambert

5. Les pâtes dures : parmesan, gruyère suisse

Pour les fromages à pâtes dures, le caillé est pressé et chauffé fortement ; le salage (sel sec ou saumure) se fait pendant plusieurs jours voire semaines, et la conservation dure quelques années (2 à 5 ans, parfois plus). Dû à cette longue conservation exceptionnelle, on les appelle fromages de garde.

Ces fromages sont les plus secs de toutes les catégories (30-35% d’eau seulement, contre 80% pour un fromage frais). Cette faible teneur en eau résulte d’un pressage extrêmement vigoureux, d’une cuisson poussée du caillé, et d’un affinage très long qui déshydrate progressivement la pâte. La texture est granuleuse, friable, parfois croquante (cristaux de tyrosine qui se forment avec le temps).

L’affinage se déroule sur plusieurs années en cave contrôlée. Durant cette période, les fromages développent une complexité aromatique extraordinaire : notes de caramel, de noisette torréfiée, de bouillon, d’épices, de fruits secs. La saveur est très riche, umami, légèrement piquante.

Les plus connus sont les fromages italiens : Parmigiano Reggiano (AOP, minimum 12 mois d’affinage, souvent 24-36 mois, jusqu’à 60 mois pour les « stravecchio »), Grana Padano (AOP, minimum 9 mois, similaire au parmesan mais légèrement plus doux), Piave, Asiago vieux (AOP).

Les fromages suisses : Gruyère suisse (AOP suisse, minimum 5 mois d’affinage, souvent 12-18 mois), Emmental suisse traditionnel (minimum 4 mois, grands trous caractéristiques), Sbrinz (extra-dur, 18-30 mois).

Autres : Mimolette extra-vieille française (18-36 mois, rendue dure par l’action d’acariens fromagers qui rongent la croûte), certains Cheddars anglais très affinés.

Ces fromages se consomment râpés (sur pâtes, risotto, gratins), en copeaux (avec un économe, en salade ou à l’apéritif), ou seuls accompagnés d’un bon vin rouge corsé ou d’un Porto Tawny. Leur richesse nutritionnelle est exceptionnelle : 35-40% de protéines, très riche en calcium (1200mg/100g pour le parmesan), vitamine A, B12.

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Récapitulatif visuel des 5 types de pâtes

Et comme d’habitude, voici un récapitulatif visuel des 5 types de pâtes, pour une meilleure mémorisation :

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Conclusion : l’art fromager français, un patrimoine vivant

La fabrication du fromage, loin d’être un simple processus technique, représente un véritable art transmis de génération en génération depuis des millénaires. Les cinq étapes fondamentales — caillage, moulage, égouttage, salage, affinage — constituent le socle commun à tous les fromages, mais c’est dans les infinies variations de chaque paramètre (type de lait, température, durée, micro-organismes utilisés, conditions d’affinage) que naît la prodigieuse diversité fromagère qui fait la fierté de la France.

La classification en cinq grandes familles de pâtes (fraîches, molles, pressées, persillées, dures) permet de comprendre les logiques de fabrication et de conservation qui distinguent un fromage frais éphémère d’un parmesan vieux de quatre ans. Cette typologie, basée sur des critères scientifiques objectifs (pH, activité de l’eau, taux d’humidité), offre une grille de lecture cohérente pour naviguer dans l’immense catalogue des 1 200 variétés françaises et des centaines d’autres fromages européens.

Chaque famille répond à des usages culinaires et des moments de consommation différents. Les fromages frais accompagnent les desserts et petit-déjeuners, les pâtes molles s’épanouissent sur un plateau de fromages en fin de repas, les pâtes pressées se prêtent merveilleusement aux recettes régionales (fondue, raclette, tartiflette, aligot), les persillées subliment salades et sauces, les pâtes dures se râpent généreusement sur les pâtes et gratins. Connaître ces catégories, c’est savoir choisir le bon fromage pour le bon usage.

Au-delà de la gastronomie, les fromages français représentent un patrimoine culturel et économique majeur : 45 appellations d’origine protégée (AOP), 1,9 million de tonnes produites annuellement, 26 kg consommés par habitant et par an (record mondial), 65 000 emplois directs. Comprendre leur fabrication et leur classification, c’est aussi perpétuer ce savoir-faire unique au monde qui fait du fromage bien plus qu’un aliment : un marqueur d’identité régionale, un vecteur de lien social, et un symbole du génie culinaire français.

FAQ : Tout savoir sur la fabrication et les types de fromages

Pourquoi tous les fromages ne sont-ils pas fabriqués avec le même lait ?

La France utilise principalement quatre types de lait pour ses fromages : vache (80% de la production, lait le plus abondant et polyvalent), chèvre (13%, saveur caractéristique plus acidulée), brebis (6%, lait très riche utilisé notamment pour le roquefort et l’ossau-iraty), bufflonne (marginal, importé d’Italie pour la vraie mozzarella di bufala). Chaque lait possède des caractéristiques distinctes : composition en protéines et lipides, taille des globules gras, saveur, rendement fromager (le lait de brebis donne 2 fois plus de fromage que le lait de vache à volume égal). Le choix dépend des traditions régionales, de la disponibilité locale, et des caractéristiques recherchées. Un camembert au lait de chèvre ou de brebis existe, mais le goût sera très différent du camembert de vache normand traditionnel. Certains fromages combinent plusieurs laits (mi-chèvre, mixtes vache-brebis).

Quelle est la différence entre présure animale, végétale et microbienne ?

La présure est l’enzyme qui fait coaguler le lait. Présure animale : extraite traditionnellement de la caillette (4e estomac) des jeunes veaux, chevreaux ou agneaux. Elle contient principalement de la chymosine (rennine) qui coagule efficacement le lait. C’est la plus utilisée historiquement et donne les meilleurs résultats pour les fromages à pâte pressée dure. Présure végétale : extraite de plantes (chardon, figuier, gaillet). Moins efficace, elle est utilisée pour certains fromages traditionnels méditerranéens (certains chèvres portugais, Serra da Estrela). Goût parfois plus amer. Présure microbienne (ferments lab) : produite par des champignons ou bactéries sélectionnés (biotechnologie). Moins chère, elle convient aux végétariens (la présure animale provenant d’abattage). Aujourd’hui, 80-90% des fromages industriels utilisent de la présure microbienne. Les fromages AOP exigent souvent la présure animale traditionnelle pour respecter l’authenticité.

Pourquoi certains fromages ont-ils des trous (emmental, comté) ?

Les trous (appelés « yeux » en fromagerie) résultent de la production de gaz carbonique (CO2) par des bactéries propioniques (Propionibacterium freudenreichii) durant l’affinage en cave chaude (18-24°C pour l’emmental). Ces bactéries consomment l’acide lactique présent dans le fromage et produisent du CO2 qui, ne pouvant s’échapper de la pâte compacte, forme des bulles qui grossissent progressivement. La taille, le nombre et la répartition des trous dépendent de la température d’affinage, de la quantité de bactéries propioniques, et de la qualité du pressage. L’emmental suisse traditionnel présente de gros trous (2-3 cm de diamètre) régulièrement répartis. Le comté possède des trous plus petits et moins nombreux. Contrairement à la croyance populaire, les trous ne sont PAS dus aux souris ! Un fromage sans trous attendus (emmental « aveugle ») est considéré comme défectueux et déclassé.

Peut-on manger la croûte de tous les fromages ?

Non, cela dépend du type de croûte. Croûtes comestibles : pâtes molles à croûte fleurie (camembert, brie) où le duvet blanc fait partie intégrante du fromage et participe à l’affinage, totalement comestible. Pâtes molles à croûte lavée (munster, époisses) : croûte orangée comestible mais parfois très forte, question de goût personnel. Pâtes pressées naturelles (comté, beaufort, tomme) : croûte épaisse formée naturellement, comestible mais souvent dure et terreuse (frottée en cave), on peut la manger mais beaucoup la retirent. Croûtes non comestibles : croûtes paraffinées (certains goudas, mimolette) ou cirées artificiellement : à retirer impérativement. Croûtes cendrées : la cendre (charbon végétal) est théoriquement comestible mais sans intérêt gustatif, on peut la brosser. Conseil général : la croûte des fromages au lait cru artisanaux est saine, celle des fromages industriels peut contenir des conservateurs (natamycine E235), mieux vaut la retirer si on a un doute.

Qu’est-ce qu’un fromage au lait cru et pourquoi est-il parfois déconseillé ?

Un fromage au lait cru est fabriqué avec du lait qui n’a subi aucun traitement thermique (pas de pasteurisation à 72°C ni de thermisation à 65°C). Le lait conserve donc toute sa flore microbienne naturelle (bactéries lactiques, enzymes) qui participe activement à l’affinage et développe des arômes complexes que la pasteurisation détruit. Les fromages au lait cru sont considérés comme plus authentiques, goûteux et typés. Inconvénient : ils peuvent contenir des bactéries pathogènes (Listeria monocytogenes, E. coli, Salmonella, Staphylococcus aureus) dangereuses pour les personnes fragiles. C’est pourquoi les fromages au lait cru sont déconseillés (voire interdits) aux femmes enceintes, jeunes enfants (<5 ans), personnes âgées et immunodéprimées. Ces populations doivent privilégier les fromages au lait pasteurisé ou les pâtes pressées cuites très affinées (comté >6 mois) où le pH bas et la faible humidité limitent les risques. En France, 15% des fromages sont au lait cru (majoritairement artisanaux et fermiers).

Combien de temps peut-on conserver un fromage et comment ?

La durée de conservation varie énormément selon le type. Fromages frais : 3-7 jours au réfrigérateur (4-6°C), respecter la DLC (date limite de consommation). Pâtes molles : 1-3 semaines au frigo après ouverture, continuer à affiner lentement. Pâtes pressées : 3-6 semaines au frigo une fois entamées. Pâtes dures : plusieurs mois voire années si conservées correctement (emballage adapté). Conseils de conservation optimale : sortir les fromages du frigo 30-60 minutes avant dégustation (température idéale 18-20°C pour libérer les arômes), emballer dans du papier à fromage ou papier sulfurisé (pas de film plastique qui les fait « transpirer » et perdre leurs qualités), conserver au frigo dans le bac à légumes (zone la moins froide), séparer les fromages à croûte fleurie des persillés (risque de contamination croisée des moisissures). Si de la moisissure indésirable apparaît, la retirer généreusement au couteau, le reste est consommable.

Pourquoi le roquefort ne peut-il être fabriqué qu’à Roquefort-sur-Soulzon ?

Le roquefort bénéficie d’une AOP (Appellation d’Origine Protégée) depuis 1925, la première AOC fromagère française. Le cahier des charges impose que l’affinage se déroule obligatoirement dans les caves naturelles de Roquefort-sur-Soulzon (Aveyron). Ces caves, creusées dans les éboulis calcaires du plateau du Combalou, présentent des conditions uniques : failles naturelles (fleurines) qui créent des courants d’air, température constante (8-10°C toute l’année), hygrométrie naturelle (95%), présence naturelle du Penicillium roqueforti dans l’environnement rocheux. Ces conditions ne peuvent être reproduites artificiellement ailleurs. Le lait de brebis provient obligatoirement de la race Lacaune élevée dans une zone délimitée (Aveyron, Lozère, Tarn, etc.). Le fromage peut être fabriqué hors de Roquefort mais l’affinage (minimum 3 mois) doit impérativement se faire dans ces caves pour mériter l’appellation. C’est cette combinaison terroir + savoir-faire + lieu unique qui justifie l’AOP et protège le nom « Roquefort » (jugement de 1961 : seul le fromage affiné à Roquefort peut porter ce nom).

Quelle est la différence entre AOP, AOC et IGP pour les fromages ?

Ce sont trois labels de qualité et d’origine. AOC (Appellation d’Origine Contrôlée) : label français créé en 1935, protège les produits dont les caractéristiques sont liées à leur origine géographique (terroir, savoir-faire local). 45 fromages français sont AOC. AOP (Appellation d’Origine Protégée) : équivalent européen de l’AOC depuis 1992. Tous les fromages AOC français sont automatiquement enregistrés en AOP au niveau européen. L’AOP protège le nom dans toute l’UE (un parmesan ne peut être fabriqué qu’en Italie dans la zone délimitée). IGP (Indication Géographique Protégée) : label européen moins strict que l’AOP, exige qu’au moins une étape de production (production du lait, fabrication ou affinage) se déroule dans la zone géographique, mais pas toutes. Exemple : Emmental français IGP (le lait peut venir de toute la France, seule la fabrication doit suivre la recette traditionnelle). L’AOP est donc plus exigeante (toute la chaîne doit être locale) que l’IGP. Ces labels garantissent authenticité, qualité, et soutiennent l’économie locale.

Peut-on congeler du fromage ?

Oui, mais avec des nuances importantes. La congélation altère la texture des fromages car les cristaux de glace brisent la structure des protéines et des lipides. Fromages qui supportent la congélation : pâtes dures et extra-dures (parmesan, comté, gruyère) déjà râpés ou en morceaux, à utiliser ensuite râpés dans des plats cuisinés (pas en dégustation directe). Pâtes pressées non cuites (raclette, cantal) pour fondue/raclette uniquement. Fromages qui supportent mal : pâtes molles (camembert, brie) deviennent granuleux et perdent leur crémeux. Pâtes fraîches (fromage blanc) se délitent complètement à la décongélation. Persillées (roquefort) perdent leur texture crémeuse. Technique : emballer sous vide ou dans du film alimentaire très serré, congeler à -18°C maximum 3 mois, décongeler lentement au frigo 24h avant utilisation. Réserver la congélation aux fromages destinés à la cuisine (gratin, tarte, sauce), jamais pour une dégustation pure. Alternative préférable : acheter en petite quantité et consommer frais.

Pourquoi certains fromages sont-ils si chers (vieux comté, roquefort) ?

Plusieurs facteurs expliquent le prix élevé de certains fromages. Durée d’affinage : un comté 36 mois a immobilisé du capital, de l’espace en cave, et de la main-d’œuvre pendant 3 ans. Chaque mois d’affinage supplémentaire augmente le coût. Rendement fromager faible : il faut 400-450 litres de lait pour une meule de comté de 40 kg, soit 10-11 litres de lait par kilo de fromage. Pour le roquefort, 4,5 litres de lait de brebis (plus cher que le lait de vache) par kilo. Coûts de production élevés : lait fermier au lait cru, production artisanale, main-d’œuvre qualifiée, caves d’affinage spécialisées, retournements fréquents. Pertes durant l’affinage : un fromage perd 8-10% de son poids en eau durant l’affinage (freinte), ce qui augmente le coût au kilo. Label AOP : cahier des charges strict, contrôles réguliers, terroir délimité augmentent les coûts. Rareté : productions limitées, saisonnières (roquefort, salers). Un comté 36 mois peut coûter 40-50€/kg contre 12-15€/kg pour un comté jeune 6 mois. Cette différence reflète le temps, le savoir-faire et la complexité aromatique exceptionnelle du produit final.

Les fromages français sont-ils meilleurs que les fromages étrangers ?

« Meilleur » est subjectif et dépend des goûts personnels, mais la France possède objectivement la plus grande diversité fromagère mondiale (1200 variétés) et le savoir-faire le plus ancien et diversifié. La tradition fromagère française, transmise depuis l’époque gallo-romaine, bénéficie de terroirs exceptionnellement variés (climats, pâturages, races animales) et d’une culture gastronomique qui valorise le fromage comme art culinaire. Cependant, d’autres pays produisent des fromages d’excellence : Italie (parmesan, mozzarella di bufala, gorgonzola, pecorino), Suisse (gruyère, emmental, vacherin), Pays-Bas (gouda, edam affinés), Espagne (manchego, cabrales, idiazabal), Angleterre (stilton, cheddar vieux). Les concours internationaux (World Cheese Awards, International Cheese Awards) couronnent régulièrement des fromages non-français. La France domine statistiquement mais n’a pas le monopole de l’excellence. La vraie question n’est pas nationaliste mais qualitative : privilégier les fromages artisanaux au lait cru, bien affinés, issus de terroirs respectés, qu’ils soient français ou étrangers.

Combien de calories contient un fromage ?

Les fromages sont des aliments riches en énergie, mais les valeurs varient considérablement selon le type et la teneur en eau. Fromages frais : 80-120 kcal/100g (fromage blanc 0% = 45 kcal, 20% = 80 kcal, petit-suisse = 100-140 kcal selon MG). Pâtes molles : 280-350 kcal/100g (camembert = 290 kcal, brie = 330 kcal, munster = 315 kcal). Pâtes pressées : 350-420 kcal/100g (comté = 410 kcal, cantal = 360 kcal, raclette = 360 kcal). Persillées : 350-380 kcal/100g (roquefort = 370 kcal, bleu d’Auvergne = 350 kcal). Pâtes dures : 380-430 kcal/100g (parmesan = 420 kcal, gruyère suisse = 410 kcal, emmental = 380 kcal). Ces calories proviennent principalement des lipides (20-35% de matière grasse) et des protéines (20-30%). Malgré leur richesse calorique, les fromages apportent calcium, protéines complètes, vitamines A-D-B12, et peuvent s’intégrer dans une alimentation équilibrée en portions raisonnables (30-40g par repas). Les recommandations nutritionnelles françaises suggèrent 2-3 portions de produits laitiers par jour, dont du fromage avec modération.

Le fromage est-il bon pour la santé ?

Oui, consommé avec modération, le fromage apporte de nombreux bénéfices nutritionnels. Points positifs : excellente source de calcium biodisponible (300-1200 mg/100g selon le type) essentiel pour la santé osseuse et dentaire ; protéines complètes de haute qualité (20-30g/100g) contenant tous les acides aminés essentiels ; vitamines A (vision, immunité), D (absorption du calcium), B12 (système nerveux), K2 (santé cardiovasculaire) ; minéraux (phosphore, zinc, sélénium) ; probiotiques dans les fromages au lait cru et fermentés (santé digestive) ; acides gras à chaîne moyenne facilement métabolisables. Des études suggèrent que la consommation modérée de fromage n’augmente pas le risque cardiovasculaire malgré les acides gras saturés (effet matrice alimentaire). Points négatifs : richesse calorique (risque de surpoids si excès) ; teneur élevée en sel (2-5% pour certains, attention hypertension) ; acides gras saturés en quantité élevée (à modérer pour les personnes à risque cardiovasculaire) ; risque allergène (protéines de lait) et intolérance au lactose (faible dans les fromages affinés car le lactose est dégradé). Recommandation : 30-40g de fromage par jour maximum dans le cadre d’une alimentation variée et équilibrée.

Pourquoi certains fromages sentent-ils si fort ?

L’odeur puissante de certains fromages (munster, époisses, maroilles, livarot, vieux-lille) résulte de réactions biochimiques complexes durant l’affinage, principalement la protéolyse (dégradation des protéines) et la lipolyse (dégradation des lipides). Ces processus produisent des composés volatils responsables des arômes : acides gras à chaîne courte (acide butyrique = odeur de beurre rance, acide caproïque = odeur caprine), composés soufrés (méthional = chou cuit, méthanethiol = putride), amines biogènes (putrescine, cadavérine = odeur de décomposition), composés ammoniacaux issus de la dégradation des protéines. Les pâtes molles à croûte lavée sont particulièrement odorantes car les bactéries d’affinage (Brevibacterium linens) présentes sur la croûte produisent ces composés en surface. Paradoxalement, un fromage qui sent fort a souvent un goût moins prononcé que son odeur ne le laisse supposer (l’odorat perçoit les molécules volatiles, le goût les molécules non volatiles). L’odeur forte n’est pas un signe de mauvaise qualité mais au contraire d’affinage abouti et de typicité. Les amateurs recherchent ces fromages de caractère, tandis que les néophytes peuvent être rebutés. Conseil : persévérer et goûter malgré l’odeur, la surprise gustative est souvent au rendez-vous !

Les végétariens peuvent-ils manger du fromage ?

Cela dépend du type de végétarisme et de la présure utilisée. Présure animale : extraite de la caillette des jeunes ruminants abattus, elle n’est pas végétarienne au sens strict. Les végétariens qui refusent tout produit issu de l’abattage d’animaux (lacto-végétariens stricts) évitent ces fromages. Environ 35-40% des fromages français utilisent de la présure animale, notamment les AOP traditionnelles (comté, camembert de Normandie, roquefort). Présure microbienne ou végétale : produite par fermentation de champignons ou extraite de plantes, elle convient aux végétariens. 60-65% des fromages français, principalement industriels, utilisent cette présure. Problème : l’étiquetage n’est pas toujours clair. Mention « présure » sans précision = généralement animale. Mention « coagulant microbien » ou « enzyme coagulante » = végétarien. Solution : privilégier les fromages labellisés « convient aux végétariens » ou contacter le producteur. Certaines marques (notamment bio) indiquent clairement l’origine de la présure. Les végétaliens (vegans) ne mangent aucun fromage animal et se tournent vers les « fromages » végétaux (soja, noix de cajou, amande) qui imitent la texture fromagère sans être techniquement des fromages.

Adrien Verschaere

1 réflexion sur “Les fromages (5/5) : pâte à pâte”

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