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Depuis 2007, JeRetiens s’est imposé dans l’espace francophone comme incontournable pour l’apprentissage, la mémorisation et la culture générale. Avec nos 1331 articles détaillés, nous abordons autant les techniques mnémotechniques que des sujets d’encyclopédie : grands récits historiques, faits insolites, traditions culturelles, religion, linguistique, et bien plus encore. Totalement gratuit, notre site se veut à la fois pédagogique et ludique, offrant à chacun la possibilité d’apprendre, de comprendre et de retenir à son rythme.

Pourquoi JeRetiens est unique ?

Nous croyons que la curiosité est le moteur principal de la connaissance. Que vous cherchiez à améliorer votre mémoire, à approfondir votre culture générale ou simplement à découvrir de nouveaux sujets, vous trouverez chez nous un large éventail de contenus : de la polémologie à l’irénologie, de la bienséance à l’alphabet arabe, des sourates de l’islam aux capitales du monde, en passant par les douze travaux d’Hercule et de nombreuses anecdotes culturelles. Dans cette mini-encyclopédie, nous mettons l’accent sur la pédagogie, les exemples concrets et les astuces mémos pour rendre chaque lecture utile et passionnante.

Explorez notre sélection des meilleurs articles

Avec plus de 1240 contenus inédits, il peut être difficile de savoir par où commencer ! C’est pourquoi nous avons créé une rubrique dédiée : Les meilleurs articles. Vous y trouverez des dossiers approfondis sur des thèmes variés : par exemple, comprendre les souvenirs d’enfance, décrypter la fonction des rêves, revisiter des chapitres marquants de l’histoire, ou encore vous familiariser avec des codes culturels du monde entier. Nous vous recommandons également de consulter nos articles de fond sur la religion et la spiritualité, dont certains consacrés à la lecture et à la mémorisation des sourates, ou encore aux traditions bouddhistes. De la mythologie gréco-romaine aux coutumes du Moyen-Âge, en passant par des fiches sur la bienséance au quotidien, il y en a pour tous les goûts.

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Mémorisation : plus de 3500 moyens mnémotechniques

Parce que retenir facilement n’est pas qu’une question de talent, JeRetiens vous propose des moyens mnémotechniques originaux et accessibles à tous. Vous utilisez déjà, sans le savoir, des phrases-clés ou des images mentales (comme « Mais où est donc OrNiCar ? » ou les poings pour savoir si un mois a 30 ou 31 jours). Nous allons encore plus loin : nos méthodes vous aideront à assimiler des listes de mots, apprendre de nouveaux alphabets (par exemple l’alphabet arabe), mémoriser les capitals du monde, ou encore retenir des séquences complexes comme les sourates et leurs versets, le tout de manière ludique. Notre objectif ? Vous permettre de gagner du temps dans vos études, votre vie professionnelle ou simplement pour nourrir votre passion du savoir.

Des articles de fond pour nourrir votre culture générale

En parallèle des techniques de mémorisation, JeRetiens s’est aussi développé comme un média d’explications pédagogiques. Chaque article se veut à la fois précis et illustré d’exemples concrets. Vous pourrez ainsi explorer l’anatomie du cerveau, découvrir pourquoi nous n’avons que peu de souvenirs de la petite enfance, ou comment fonctionne la répétition espacée pour ancrer vos connaissances. Nous abordons également des sujets variés comme la bienséance et le savoir-vivre, l’évolution de certaines coutumes et même des réflexions sur la spiritualité, la littérature et l’étymologie.

Énigmes, quiz et casse-têtes : amusez-vous en apprenant

Pour rendre l’apprentissage plus amusant, nous proposons aussi des énigmes et casse-têtes. Vous y trouverez des défis logiques, des rébus, des devinettes historiques ou littéraires, et bien d’autres jeux qui feront travailler vos méninges tout en enrichissant votre culture générale. De nombreuses énigmes sont accompagnées de solutions explicatives et de pistes mnémotechniques pour progresser.

Une mini-encyclopédie gratuite, en constante évolution

Avec ses centaines de sujets, JeRetiens a évolué pour devenir une véritable base de connaissances en ligne. Notre plateforme est entièrement gratuite et résulte d’un travail collaboratif : chacun peut proposer ses propres trucs mnémotechniques, enrichir des articles existants ou suggérer de nouveaux thèmes à aborder. Au fil des ans, ce sont 17 ans d’articles, de retours de lecteurs et d’astuces testées qui alimentent ce site. Nous croyons que la connaissance doit être partagée librement pour que chacun puisse progresser et s’ouvrir à de nouveaux horizons.

Nos dernières publications

Si vous êtes un peu perdu, commencez par parcourir nos meilleurs articles : vous y trouverez nos coups de cœur et des textes de fond qui traitent aussi bien de mythologie, de religion, de science ou d’éducation. Nous mettons à jour régulièrement l’article du mois, pour mettre en lumière des sujets phares, des méthodes innovantes ou des découvertes insolites. Pensez également à jeter un œil aux nouveautés pour profiter de contenus encore frais !
Au passage, pour en savoir plus sur l’architecture, découvrez cet article ou celui-ci, qui explorent différents styles et techniques de construction.

Schéma de la respiration et de son fonctionnement chez l'homme
Intéressons-nous à la respiration et à ses fonctions et comprenons son rôle à travers un article simple et un schéma
La Toussaint, peint par Émile Friant en 1888. Ce tableau de la fin du XIXème siècle nous renseigne sur les traditions lors de la Toussaint: aller fleurir de chrysanthèmes les tombes et allumer des chandelles.
Tout le monde connait la Toussaint et bénéficie du jour férié du 1er novembre. Profitez donc de ce temps de
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Que vous soyez passionné d’histoire, avide de connaissances bibliques ou coraniques, amateur de mythologies ou de coutumes du monde, curieux de mieux apprendre une langue (avec par exemple l’alphabet arabe), ou simplement en quête d’une bonne méthode pour retenir vos cours, vous trouverez forcément votre bonheur dans notre mini-encyclopédie. Chaque article a pour vocation de vous fournir un contenu de fond, tout en vous proposant des moyens mnémotechniques lorsque c’est pertinent.

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Intéressons-nous à la respiration et à ses fonctions et comprenons son rôle à travers un article simple et un schéma compréhensible.

Définition

La respiration est l’ensemble des fonctions par lesquelles sont assurés les échanges gazeux d’un organisme. Elles résultent de l’absorption d’oxygène et de l’élimination de gaz carbonique.
L’oxygène est un gaz présent dans l’air à hauteur de 21% du mélange gazeux. Sa présence est indispensable à la phosphorylation oxydative, principal mécanisme de fabrication d’énergie par l’organisme.

Chez l’homme

Schéma de la respiration et de son fonctionnement chez l'homme
Schéma de la respiration et de son fonctionnement chez l’homme.

La respiration est accomplie par les poumons.

Le trajet de l’air :

  1. L’air est inhalé par le nez ou la bouche.
  2. Il passe ensuite dans le pharynx et la trachée.
  3. Il est distribué dans les bronches.
  4. Il est distribué dans les deux poumons.
  5. L’air est traité dans les alvéoles pulmonaires.

 

Le travail de l’alvéole

 

Les alvéoles pulmonaires sont des cavités en cul-de-sac. Elles sont en contact étroit avec une multitude de veines transportant le sang veineux dépourvu d’oxygène.
C’est au contact de l’alvéole pulmonaire que s’effectuent les échanges gazeux entre le sang et l’air inspiré. Le sang veineux se charge d’oxygène et se décharge du gaz carbonique et des déchets.
Le sang qui sort des poumons est dit artériel : c’est-à-dire riche en oxygène. L’artère pulmonaire mène le sang au cœur qui, par ses pulsations le distribue dans tout le corps.

L’expiration

L’air expiré par les poumons emprunte le trajet inverse de l’inspiration. Il est pauvre en oxygène et riche en gaz carbonique et en déchets.

Le rôle de la respiration

La respiration apporte donc à l’organisme de manière répétée et continue une substance (l’oxygène) indispensable à son bon fonctionnement.

L’oxygène est distribué par les globules rouges dans le système artériel à tous les tissus de l’organisme et lui fournit de l’énergie. Cette énergie lui permet de fonctionner : le cœur est un muscle qui bat grâce à l’énergie de l’oxygène, tous les mouvements sont faits grâce à l’énergie de l’oxygène, le cerveau fonctionne grâce à l’énergie de l’oxygène.

On peut dire que l’oxygène est au corps ce que l’essence est à la voiture.

 

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Tout le monde connait la Toussaint et bénéficie du jour férié du 1er novembre. Profitez donc de ce temps de repos pour découvrir que l’Histoire de cette fête remonte à l’antiquité et a bien évolué depuis !

Qu’est-ce que la Toussaint ?

Avant toute exploration historique, tâchons de donner une définition de la fête de la Toussaint !

Comme son nom l’évoque, la Toussaint est la fête de tous les saints. Il s’agit d’une fête solennelle célébrée chaque 1er novembre par l’Église catholique latine. Cette fête honore tous les saints, connus et inconnus.

La Toussaint se déroule comme suit: sa liturgie débute le 31 octobre aux vêpres (correspondant au soir, quand il fait encore jour, donc entre 17h et 19h), et prend fin à la fin du premier novembre. La Toussaint précède une autre célébration instituée le 2 novembre et nommée la Commémoration des fidèles défunts. Plus connue sous le nom de « le jour des morts » durant laquelle Dieu offre aux âmes la délivrance du purgatoire et leur soulagement.

Qui est célébré à la Toussaint par l’Église ?

L’Église célèbre les saints connus et inconnus, cela signifie que d’une part les personnes canonisées devenues des saints sont célébrés, mais également « toute autre personne » n’ayant pas été canonisée mais ayant voué leur vie à l’Évangile et au service de tous.
L’Église catholique de France indique que

Cette fête est donc aussi l’occasion de rappeler que tous les hommes sont appelés à la sainteté, par des chemins différents, parfois surprenants ou inattendus, mais tous accessibles.

Origine historique de la Toussaint

Comme la plupart des fêtes chrétiennes, leur origine remonte à l’antiquité romaine tardive. Ces fêtes ont évolué avec les siècles et les modifications de culte et de catéchèse.

En ce qui concerne la Toussaint, son origine remonte au IVème siècle de notre ère durant lequel l’Église syrienne consacre un jour pour fêter l’ensemble des martyrs. Le problème c’est que ce nombre étant devenu tellement important qu’une commémoration individuelle devient impossible.

Au Vème siècle à Rome, le dimanche après la Pentecôte est le jour usuel pour célébrer les saints et les martyrs.

Le 13 mai 610, le Pape Boniface IV transforme le Panthéon (le temple romain dédié à tous les dieux romains), devenu depuis un sanctuaire dédié à tous les martyrs en une église Sainte-Marie-et-des-martyrs dédiée à tous les saints.
Il s’agit avant tout d’un effort du pape pour christianiser les traditions païennes nombreuses à cette époque.
Toussaint est alors célébrée le 13 mai en hommage à l’instauration de l’église Sainte-Marie-et-des-martyrs.

Cette coutume se répand en Occident, cependant chaque Église fête les saints et martyrs à des dates différentes pendant un peu plus de deux siècles.

C’est en 835, que le Pape Grégoire IV fixe la date au 1er novembre pour l’ensemble du monde catholique romain. La date de célébration de la Toussaint reste pour l’Église byzantine, le dimanche suivant la Pentecôte.
Louis-le-Pieux, fils de Charlemagne, soutient Grégoire IV et institue la Toussaint sur tout le territoire de l’empire carolingien.

Vers la fête des morts au IXème siècle

Dès 998, les clunisiens instituent une fête des morts le 2 novembre. A l’époque, il s’agit d’une célébration locale (Abbaye de Cluny) mais qui près de 250 ans plus tard se généralise en tant que la « commémoration des fidèles défunts » durant le XIIIème siècle.

Cette commémoration des fidèles défunts comme nous l’avons évoquée en début d’article apparaît de manière assez cohérente durant le XIIIème siècle et ne pouvait pas exister avant. La raison est très simple: avant le deuxième concile de Lyon en 1274, la notion de purgatoire n’existe pas !
Difficile donc d’offrir aux âmes la délivrance d’un lieu dont elles ne connaissent ni l’existence ni le concept…

… une fête qui devient une fête d’obligation, solennelle

Deux papes ont joué un rôle important dans l’obligation de fêter la Toussaint. Il s’agit du Pape Sixte IV et du Pape Pie XI. Ils ne sont en rien contemporains mais témoignent de l’évolution de Toussaint durant le deuxième millénaire.

Sixte IV en 1484 dote la fête de Toussaint d’une octave ou huitaine. Il s’agit d’une période de huit jours qui suivent une fête donnée. Cela en accroît le caractère solennel.

Pie XI quant à lui fait de la Toussaint une fête d’obligation en 1914. Cela accroît encore plus la solennité de la fête.
A l’heure actuelle, les peu de fêtes religieuses bénéficient de ce caractère solennel. En voici la liste exhaustive dans le code de droit canonique: 1er Janvier (Fête de Marie), 6 janvier (Épiphanie), 19 mars (Saint-Joseph), 40 jours après Pacques (Ascension du Seigneur), jeudi qui suit le dimanche de la Sainte Trinité (Très saint Corps et Sang du Christ), 29 juin (Solennité des saints Pierre et Paul), 15 août (Assomption de la Vierge marie), 1er novembre (Toussaint), 8 décembre (Immaculée-Conception), 25 décembre (Nativité).

Toussaint aujourd’hui

Bien que la distinction soit claire entre la fête de la Toussaint et celle de la Commémoration des fidèles défunts, et que ces deux fêtes ont lieu à des jours différents, le fait que le 1er novembre soit un jour férié a changé l’usage et la pratique: on commémore les morts le jour de la Toussaint au lieu du 2 novembre. Dans la pratique, la sécularisation de la société n’a pas fait disparaître la Toussaint mais cette fête religieuse est devenue au fil des années le maintient d’une tradition datant du XIXème siècle où les tombes sont fleuries et des chandelles allumées, symbolisant une vie heureuse après la mort.

Toussaint tradition fleurir tombes tableau chrysanthèmes émile friant jour des morts
La Toussaint, peint par Émile Friant en 1888. Ce tableau de la fin du XIXème siècle nous renseigne sur les traditions lors de la Toussaint: aller fleurir de chrysanthèmes les tombes et allumer des chandelles.

La légende dorée de Jacques de Voragine

Jacobus de Varagine ou Jacques de Voragine en français est archevêque de Gênes au XIIIème siècle. Il rédige la Legenda aurea (légende dorée) où il raconte l’origine de la Toussaint avec un point de style bercé par l’épique et le merveilleux caractéristiques de Moyen-Âge.
Ce texte se trouve numériquement sur le site de la bnf, n’hésitez pas à y jeter un coup d’oeil: Jacques de Voragine: la légende dorée.
En voici quelques extraits:

La Toussaint

La fête de la Toussaint a été instituée pour quatre objets :
en premier lieu, pour commémorer la consécration d’un temple,
en second lieu pour suppléer à des omissions;
en troisième lieu pour expier nos négligences,
en quatrième lieu pour nous faciliter l’accomplissement de nos vœux.

I] Voici d’abord l’histoire de la consécration du temple. Les Romains devenus maîtres du monde, avaient construit un temple énorme, au milieu duquel ils avaient placé leur idole; et tout à l’entour étaient les idoles de toutes les provinces conquises la face tournée vers l’idole des Romains. […] Mais bientôt ce temple ne suffit pas aux Romains, qui construisirent pour chaque dieu un temple particulier. Et comme tous les dieux ne ne pouvaient pas avoir un temple à eux dans la ville, les Romains, pour mieux étaler leur folie, construisirent en l’honneur de tous les dieux un temple plus admirable encore que les autres, et l’appelèrent le Panthéon, ce qui signifie le temple de tous les dieux. Pour tromper le peuple, les prêtres des idoles lui racontèrent que la déesse Cybèle, qu’ils appelaient la mère de tous les dieux, leur était apparue ; et cette déesse leur aurait dit que, si Rome voulait remporter la victoire sur toutes les nations, on eût à élever, à tous les dieux ses fils, un temple magnifique. Ce temple fut construit sur une base circulaire, afin de symboliser l’éternité des dieux.

Or, sous le règne de l’empereur Phocas, lorsque depuis longtemps déjà Rome était devenue chrétienne, le pape Boniface, quatrième successeur de Saint Grégoire, obtint de l’empereur le susdit temple, le débarrassa de toutes ses idoles, et, le 3 mai de l’année 605, le consacra à la Vierge Marie et à tous les martyrs : d’où il reçut le nom de Sainte-Marie aux Martyrs.

Plus tard, encore, un pape nommé Grégoire transporta au 1er novembre la date de la fête anniversaire de cette consécration : car à cette fête les fidèles venaient en foule, pour rendre hommage aux saints martyrs, et le pape jugea meilleur que la fête fut célébrée à un moment de l’année où les vendanges et les moissons étaient faites, les pèlerins pouvaient plus facilement trouver à se nourrir. En même temps, ce pape décréta qu’on célébrerait, ce jour là, dans l’Église tout entière, non seulement l’anniversaire de cette consécration, mais la mémoire de tous les saints. Et ainsi ce temple, qui avait été construit pour toutes les idoles, se trouve aujourd’hui consacré à tous les saints.

II] La fête de la Toussaint a été instituée pour suppléer à des omissions : car il y a beaucoup de saints que nous oublions, et qui non seulement n’ont pas de fête propre, mais qui ne se trouvent même pas commémorés dans nos prières. c’est en effet chose impossible que nous célébrions séparément la fête de tous les saints, tant à cause de leur innombrable quantité que de notre faiblesse et du manque de temps.

III] La fête de la Toussaint a été instituée pour expier des négligences. car bien que nous ne célébrions la fête que de peu de saints, encore négligeons-nous souvent ceux-là même, par ignorance ou par paresse. Et c’est de ce péché que nous pouvons nous délivrer en célébrant d’une façon générale tous les saints, le jour de la Toussaint. […]

IV] Enfin la fête de la Toussaint a été instituée pour nous faciliter l’obtention de nos vœux. De même que nous honorons en ce jour tous les saints, de même nous leur demandons d’intercéder, tous ensemble, pour nous, de façon à nous faire avoir plus facilement la miséricorde de Dieu. Les saints peuvent, en effet intercéder pour nous par leurs mérites et par leur affection : par leur mérite en ce que le surplus de leurs bonnes œuvres s’emploie à compenser nos fautes; par leur affection en ce qu’ils demandent à Dieu que nos vœux se réalisent, chose qu’ils ne font, cependant, que quand ils savent que cela ne contrarie pas la volonté de Dieu.

Et que, dans ce jour, tous les saints se joignent pour intercéder en notre faveur, c’est ce que prouve une vision qui eut lieu l’année qui suivit l’institution de cette fête. le jour de la Toussaint de cette année-là, le gardien de l’église de saint Pierre, après avoir pieusement fait le tour de tous les autels et imploré les suffrages de tous les saints, s’assoupit un moment devant l’autel de saint Pierre. Il fut alors ravi en extase et vit le Roi des Rois assis sur son trône, avec tous les anges autour de lui. Puis vint la Vierge des Vierges, avec un diadème de feu autour de la tête, et suivie de la foule innombrable des vierges.

Puis l’ange conduisit le gardien dans un autre lieu, où il lui montra des personnes des deux sexes, dont les unes étaient vêtues d’or, ou assises à des tables somptueuses, tandis que d’autres, nues et misérables, mendiaient du secours. Et l’ange dit au gardien : « Ce lieu est le Purgatoire. Les âmes que tu vois dans l’abondance sont celles qu’assistent copieusement les suffrages de leurs amis; les âmes de ces mendiants sont celles de personnes qui n’ont point d’amis, au ciel ni sur la terre, pour s’occuper d’elles. »

Et l’ange ordonna au gardien de rapporter tout cela au souverain pontife, afin que, après la fête de la Toussaint, il instituât la fête des Âmes, c’est-à-dire une fête où, du moins, des suffrages communs s’élèveraient au ciel en faveur de ceux qui n’avaient personne pour adresser en leur faveur des suffrages particuliers.

Le jour des âmes

L’Église a institué, en ce jour, la commémoration des fidèles défunts, afin d’accorder un bénéfice général de prières à ceux, parmi ces défunts, qui n’en possèdent point de particuliers. Cette fête a été instituée à la suite de la vision racontée au chapitre précédent. Pierre Damien raconte aussi que saint Odilon, abbé de Cluny, apprenant que l’on entendait souvent sortir de l’Etna les hurlements des démons et les voix plaintives d’âmes défuntes qui demandaient à être arrachées de leurs mains par des aumônes et des prières, décida que, dans les monastères de son ordre, la fête de la Toussaint serait suivie de la commémoration des âmes défuntes ; et cette décision fut ensuite approuvée par l’Église entière.

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Invoquer et évoquer sont deux verbes qui possèdent une origine commune mais qui signifient deux choses différentes.

Grâce à leur étymologie et à la mise en évidence de cette distinction, nous allons préciser leur usage.

Invoquer

Étymologiquement, invoquer vient de invocare en latin (vocare veut dire appeler, vox veut dire voix), qui signifie « appeler au secours« . Par extension, invoquer signifie « appeler à l’aide de prières (une divinité pour en recevoir de l’aide) », voire « implorer ».
Invoquer peut aussi signifier le fait de « faire appel à quelque chose pour se justifier », ou encore « citer en sa faveur », « en appeler à ».

Exemples

  • Les poètes invoquent Apollon, les muses et autres divinités de la Fable.
  • Elles ont retrouvé leur chemin en car elles ont invoqué Saint-Christophe.
  • L’accusé invoque la clémence des jurés.
  • Aux États-Unis, il est coutume d’invoquer le 5ème amendement (ne pas témoigner contre soi-même, ne pas être jugé deux fois pour le même crime, etc.).
  • Les enfants ont invoqué les esprits en jouant à Ouija.

Évoquer

Étymologiquement, évoquer vient de evocare en latin (préfixe e de ex-, vocare veut dire appeler, vox veut dire voix) qui signifie appeler, faire venir les esprits (en parlant d’eux), mais aussi se rappeler, faire allusion à ou encore se remémorer un souvenir.

Exemples

  • Les chamans prétendent évoquer les âmes des morts.
  • Papy évoque souvent l’importance des bateaux dans sa vie.
  • Ce problème n’a pas encore été évoqué lors de nos séances.
  • Cette madeleine évoque l’enfance de Proust.
  • Lors de notre dernière entrevue, nous avons évoqué des souvenirs d’école.

La différence entre invoquer et évoquer

La distinction est donc simple: même si invoquer et évoquer ont une origine étymologique commune, ils signifient deux choses différentes.
Invoquer signifie appeler à l’aide par des prières, implorer, faire appel à quelque chose pour se justifier, citer en sa faveur, ou appeler au secours.
Évoquer signifie faire venir les esprits en parlant d’eux, ou se rappeler, faire allusion ou encore se remémorer un souvenir.

Différence entre à gauche une invocation (le fait d'invoquer des esprits); et à droite une évocation (le fait d'évoquer des souvenirs. Dans cet exemple, il s'agit du célèbre Père Castor qui évoque une histoire !)
Différence entre à gauche une invocation (le fait d’invoquer des esprits); et à droite une évocation (le fait d’évoquer des souvenirs. Dans cet exemple, il s’agit du célèbre Père Castor qui évoque une histoire !)

La distinction entre invocation et évocation

Invocation et évocation sont deux mots dérivés des verbes invoquer et évoquer. La différence se base sur le même principe: le sens.

L’évocation est l’action d’évoquer, on peut donc parler le l’évocation des souvenirs, l’évocation d’un moment heureux, etc.
L’invocation est l’action d’invoquer, on peut donc parler de l’invocation des dieux, des esprits, ou encore de certains articles de loi.

Et… pour les personnes superstitieuses, n’oubliez pas qu’évoquer des choses peut parfois… les invoquer !

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Les débuts de l’orthographe « française »: du concile de Tours de 813 aux serments de Strasbourg de 842

Lors du concile de Tours de 813, l’Église catholique ordonne aux prêtres de faire leurs prônes de manière à ce que le peuple puisse les comprendre. Les évêques rassemblés par Charlemagne décident que les homélies ne doivent plus être prononcées en latin, mais en rusticam Romanam linguam aut Theodiscam, quo facilius cuncti possint intellegere quae dicuntur, autrement dit en langue rustique romane ou en langue tudesque (germanique), selon le cas. Il faut attendre les Serments de Strasbourg pour que le premier texte complet écrit dans une langue issue du latin et clairement distincte de cette langue soit attesté. Cette langue est le roman, et c’est, de fait, la plus ancienne langue romane attestée.
Le premier texte littéraire, quant à lui, est la Séquence de Sainte Eulalie.

Les « Serments de Strasbourg“ de 842 présentent les premières traces qui nous sont parvenues d’une mise à l’écrit de la langue vulgaire parlée dans une situation de bilinguisme latin-roman. Graphie phonétique dans son principe, elle utilise l’alphabet roman pour transcrire des sons qui se sont éloignés du latin.

L’orthographe française ne s’est pas toujours présentée sous la forme qu’elle a aujourd’hui. Si on lit les textes des auteurs des XVIe et XVIIe siècles dans leurs éditions originales, on s’aperçoit de différences considérables par rapport à l’orthographe actuelle.

Ainsi, pour citer deux exemples, on trouve chez Rabelais (1535) ce passage :
Cy n’entrez pas, hypocrites, bigotz, Uieulx matagotz, marmiteux, borsouflez, Torcoulx, badaux, plus que n’estoient les Gotz, Ny Ostrogotz, persecurseurs de magotz…

Ou bien chez Descartes (1637) le texte suivant :
Pour moy ie n’ay iamais presumé que mon esprit fust en rien plus parfait que ceux du commun : mesme i’ai souuent souhaité d’auoir la pensee aussi prompte, ou l’imagination aussy nette et distincte, ou la memoire aussy ample, ou aussy presente, que quelques autres.

Un des arguments des opposants aux réformes d’orthographe est nourri par la crainte qu’on ne pourrait plus lire les classiques si l’on en changeait l’orthographe ; cet argument est sans fondement, car c’est à l’inverse grâce aux adaptations en orthographe actuelle qu’on peut les lire encore aujourd’hui !

La non codification de l’ancien français, le « vieux françois » et ses différentes écritures

Au XIème siècle, on trouve en pays d’Oc une riche littérature écrite en ancien français dans une orthographe non codifiée, la « graphie des jongleurs », avec des différences individuelles selon l’auteur et sa région. Pour la région de Paris, il faut attendre le XIIIe siècle pour trouver des copies transcrites en « français ».

Entre le XIIIème et le XVIème siècle, les principales tendances de la graphie sont, selon N. Catach, une « Tendance phonétique et plus exactement encore, un […] caractère phonologique de notre orthographe » auxquels s’ajoutent des « Tendances étymologique, historique, morphologique et sémantique, avec le rôle tout particulier joué par la distinction des homonymes et le problème des monosyllabes. […] ces tendances sont […], dans l’ensemble, les mêmes que celles de notre orthographe actuelle ».

A cette dichotomie de base s’ajoute celle des écritures et de leur fonction : la « caroline » qui était utilisée pour les textes en latin et appliquée par les clercs dans les couvents et par les écrivains des chansons de geste ; la « gothique » qui s’écrivait plus vite, mais de façon moins lisible et qui servait aux greffiers, aux notaires, aux chanceliers qui transcrivaient la langue vernaculaire pour faire face à la demande croissante de textes de la vie « pratique ».

En 1230, Henri d’Andeli rédige un chapitre intitulé « Bataille des VII ars » (Bataille des Sept Arts) qui présente l’étude grammaticale telle qu’elle est connue à l’école de la cathédrale d’Orléans, réputée pour enseigner la grammaire comme langue et littérature et une approche ornée et littéraire des ars dictaminis (composition des textes en prose), ainsi que l’étude du droit civil et canonique. Dans ce chapitre apparaît le mot « ortografie ».

Malgré tout, la non codification est telle que même les noms des seigneurs utilisés dans les chartes et diplômes peuvent varier au sein d’un même document ! Prenons l’exemple en « vieux françois » de Roger, sire de Mercy-le-Haut qui vend à l’Abbaye de Saint-Hubert (Belgique actuelle), tous ses biens de Neuvillers en Ardenne le 16 janvier 1290:

Je Rogiers, sires de Marcey, chevaliers, fas connoissant a tous ciaus qui ces presentes lettres verront et orront que je ai vandu a tosjors en heritage et en perpetuitei a homes religieus Thiebaut, par la grace de Deu abbes de Saint Hubert en Ardenne, et au covent de cel meisme leu desordit quanque je ai, pui avoir et doi en la ville de Nuefvillers en Ardenne et en toutes les appendizes entierement des leus desordis, c’est a savoir en homes, en asizes, en justice, en four, en moulin, en tous provages en toutes revenues et en toutes autres chozes quesconques elles soient et puissent estre, parmei une somme d’argent, c’est a savoir de sezevins livres de petis tournois, lesquelles sezevins livres je ai receu des desordis abbei et couvent en bons deniers (…)

Ce seigneur s’annonce en tant que Rogiers et se mentionne également comme Rogier ou Rogers dans son document.

Des tentatives de codifier l’orthographie française à l’imposition du français comme langue officielle au XVIème siècle

En 1529, Geoffroy Tory un imprimeur-libraire qui réalise ses caractères d’imprimerie lui-même introduit les accents, la cédille et l’apostrophe dans la graphie du français. Son zèle pour la langue française entre dans les vues de François Ier, qui lui accorde le titre d’imprimeur du roi en 1529, et le fait admettre comme libraire de l’université de Paris en 1532.

En 1529 toujours, Jacques Lefèvre d’Etaples (théologien et humaniste) et Simon de Colines (imprimeur-libraire) réalisent Grammatographia, un traité de grammaire et de ponctuation.

En 1531, Jacob Dubois dit Sylvius rédige Grammatica latinogallica Isagoge qui comprend un système accentuel très novateur.

En 1533, Geoffroy Tory (avec la collaboration de Clément Marot, un poète) réalise La Briève Doctrine considérée comme le premier code orthotypographique français, traité d’accentuation et propositions de caractères.

En 1538, François Ier créé l’Imprimerie du Roy.

En 1539, l’« Ordonnance de Villers-Cotterêts » prise par le Roi François Ier impose l’usage du français dans les actes officiels et de justice.

En 1540, Étienne Dolet, philologue et traducteur de textes de Cicéron et Platon en français publie Manière de bien traduire d’une langue en aultre, Il utilise des accents et la ponctuation.

En 1542, Louis Meigret, grammairien, défend « l’idée de la phonofixation des graphies »; il pense qu’il « revient aux spécialistes de fixer la graphie, en la réglant sur l’usage oral, dont ils sont le greffier. » Néanmoins, il est conscient qu’en proposant son orthographe, « l’ecritture semblera etrãje de primme face, donãt pein’ ao lecteur jà accoutumé a un’aotre ».

Entre 1547 et 1550, Jacques Péletier du Mans, mathématicien, poète de la Pléiade, grammairien, publie une doctrine réformiste de l’orthographe intitulée: Dialogue de l’ortografe et prononciacion françoise.

En 1550, Louis Meigret publie une doctrine phonétiste intitulée Tretté de la Grammere Françœze.

Toujours en 1550, Pierre de Ronsard mentionne dans son Avertissement au lecteur des Quatre premiers livres des Odes, l’orthographe réformée de la Pléiade. Vous pouvez lire cet avertissement retranscrit ici.

En 1557, Robert Estienne, imprimeur et lexicographe publie une doctrine conservatrice et étymologisante intitulée Trakte de la grammaire françoise.

Clément Marot portraité par Corneille de Lyon en 1536.
Clément Marot portraité par Corneille de Lyon en 1536.

En 1558, l’édition des œuvres de Clément Marot  à Lyon par l’imprimeur Jean de Tournes père nous indique les premières distinctions entre le i et le j et entre le u et le v. Dans un poème « à ses disciples » apparaissent les règles de l’accord du participe passé.

En 1562, Pierre de La Ramée dit Ramus, logicien et philosophe publie Gramere dans laquelle sont reprises les distinctions i/j et u/v, qui sont appelées « ramistes » ; le phonétisme est généralisé.

En 1565, Ronsard publie son Abbrégé de l’Art Poétique.

Évolutions de la grammaire et de l’orthographe et écrits contestataires au 17ème siècle

En 1609, Raymond Poisson publie Épitre au Roi contre la « latinortografe » de Robert Estienne.

En 1620, Jean Godard dans La Langue françoise suppressime les s muets et les remplace par des accents circonflexes (une fenestre s’écrit désormais fenêtre), défense du t euphonique, suppression de lettres étymologiques, distinction en/an)

En 1632, Antoine Oudin publie un écrit contestatire « Aduis touchant l’orthographe », dans Grammaire françoise contre les « modernes » et les « nouuelles escritures ».

En 1635, Louis XIII et Richelieu fondent l’Académie Française.

En 1635, l’Abbé Monet publie Invantaire des deus langues françoise et latine avec une « nouvelle manière d’écriture », contre la « Règle Etymologi- sante ».

En 1639, Gilles Ménage écrit une Requeste présentée par les dictionnaires à Messieurs de l’Académie pour la reformation de la langue françoise.

En 1640, Richelieu crée la « Manufacture royale d’Imprimerie ».

En 1647, Claude Favre de Vaugelas dans les Remarques sur la langue française, définit le bon et bel usage comme « la façon de parler de la plus saine partie de la Cour, conformément à la façon d’escrire de la plus saine partie des Autheurs du temps ».

En 1660, Antoine Arnauld et Claude Lancelot publient Port-Royal : Grammaire générale et raisonnée.

En 1660-1661, Antoine Baudeau de Somaize écrit un Grand dictionnaire historique des Pretieuses qui milite pour une « ortographe » simplifiée/

En 1663, Pierre Corneille préconise les lettres « ramistes » et la distinction entre « l’e simple, l’é aigu et l’è grave » dans un Avis au lecteur.

En 1668, Louis de Lesclache publie Les Véritables régies de l’ortografe francéze, phonétisme.

En 1672, Gilles Ménage rédige Observations sur la langue françoise.

Première motivation de l’Académie Française sur l’évolution de l’orthographe en 1673

En 1673, l’Académie française (fondée en 1635 par Richelieu) demande à Eudes de Mézeray d’établir des règles pour l’orthographe française. Les commentaires des membres de l’Académie ainsi que de Bossuet forment la première prise de position conservatrice de l’Académie :

 …la Compagnie préfère l’ancienne orthographe, qui distingue les gens de Lettres d’avec les Ignorants et est d’avis de l’observer partout, hormis dans les mots où un long et constant usage en a introduite une différente.

En 1680, César-Pierre Richelet publie un Dictionnaire françois avec un système complet d’orthographe simplifiée.

En 1694 est publiée la Première édition du Dictionnaire de l’Académie, plutôt conservatrice, étymologisante, mais Corneille répand l’usage des « lettres ramistes ».

En 1706, François-Séraphin Regnier-Desmarais publie un Traité de grammaire latiniste.

En 1709, les tendances à mieux rendre la langue parlée par l’écrit aboutissent à une tentative de former une écriture phonétique (Claude Buffier).

En 1716, l’Abbé Girard publie L’Ortografe française sans équivoques et dans ses principes naturels.

C’est en 1719, que les Jésuites de Trévoux établissent un Plan d’une ortographe suivie pour les imprimeurs comprenant des simplifications et un usage généralisé des accents.

Un premier pas vers la pédagogie: le bureau typographique de Dumas

En 1733, Pierre Simon édite le Sistême du Bureau tipografique de Louis Dumas qui développe un apprentissage ludique de la lecture: Il créé donc un meuble pédagogique qui reprend les casses typographiques où sont rangées lettres, chiffres, et signes de ponctuation. Tous ces caractères sont inscrits sur le dos de cartes à jouer pour donner le goût d’apprendre aux enfants en leur proposant l’alliance la réflexion et le mouvement du corps. Ce bureau a connu un très grand succès auprès des familles riches car il était très coûteux. Dans les écoles populaires, seul l’abécédaire est utilisé.

Gravure du Bureau typographique de Louis Dumas. Système pédagogique d'apprentissage de la lecture et de l'écriture au début du XVIIIème siècle. La gravure fait mention de 1732 en chiffres romain, la publication date de 1733.
Gravure du Bureau typographique de Louis Dumas. Système pédagogique d’apprentissage de la lecture et de l’écriture au début du XVIIIème siècle. La gravure fait mention de 1732 en chiffres romain, la publication date de 1733. Le Y n’étant pas encore réglementé, Typographique s’écrit à l’époque… Tipographique.

La réglementation du Y en 1740

Entre 1740 et 1762, sont publiées les 3ème et 4ème éditions du Dictionnaire de l’Académie, dirigée par l’abbé d’Olivet impliquant de nombreuses et importantes simplifications orthographiques.
Dans la troisième édition du Dictionnaire en 1740, le nombre des lettres étymologiques est considérablement réduit, un emploi conséquent des accents est envisagé et l’usage de la lettre y est réglementé, de sorte que dans cette édition la graphie de 6177 mots change.

En 1767, Nicolas Beauzée, grammairien, émet des Propositions pour une orthographe « moderne ».

En 1771, Voltaire s’engage pour une simplification de l’orthographe, il écrit:

L’écriture est la peinture de la voix, plus elle est ressemblante, mieux elle est.

Entre 1784 et 1795, François-Urbain Domergue académicien et surnommé « le grammairien patriote » car il souhaite l’unité linguistique pour favoriser l’unité nationale, rédige le Journal de la Langue française. Dans le premier numéro il écrit:

Fonder sur une métaphysique claire un système de grammaire absolument neuf, sans prétendre donner l’exclusion à aucun autre ; répondre aux différentes questions sur la langue écrite ou parlée ; exercer une censure motivée, instructive ; donner une théorie succincte et lumineuse de tous les ouvrages de goût, soit en prose, soit en vers ; n’annoncer, n’analyser, ne recueillir que ceux qui portent l’empreinte du talent ; consacrer dans le langage des dieux tous les événemens moraux, physiques et politiques, dignes de l’attention des hommes : tel est le plan du Journal de la Langue Françoise. Puissent les amateurs de la première langue de l’Europe honorer de leur suffrage un journal que tous les gens de lettres sont suppliés d’embellir de leurs productions

En 1798, la 5ème édition du Dictionnaire de l’Académie poursuit les simplifications et ajoute un glossaire de termes « révolutionnaires ».

François-Urbain Domergue écrit en 1805 une Lettre à Napoléon demandant « la réforme de notre orthographe ».

En 1811, Charles-Pierre Girault-Duvivier rédige Grammaire des grammaires et fait preuve d’un fort conservatisme jusque dans les erreurs d’étymologie.

Entre 1827 et 1829, Charles Louis Marle, grammairien, fonde la « Société pour la propagation de la réforme orthographique » à laquelle parviennent 33000 lettres d’adhésion. Marle rédige un Appel aux Français (1829), dont il vend 100000 exemplaires et dans lequel il écrit que

L’éqriture n’a été invantée que pour pindre la parole.

… Mais la guerre de 1830 met fin à toute initiative de réforme.

En 1833, Décret Guizot est promulgué, il institue l’orthographe comme épreuve du brevet des maîtres.

En 1835, dans la sixième édition du Dictionnaire, l’Académie se trouve investie d’une responsabilité « qu’elle n’avait jamais eue […] : les imprimeurs, en particulier, firent de l’orthographe du Dictionnaire de 1835 […] l’étalon suprême du français écrit, erreur dont encore à l’heure actuelle, nous payons doublement les frais, par le mauvais choix de l’étalon, et par le principe même d’un étalon en la matière. »  indique Nina Catach en 2001.
Les lettres dites grecques qui avaient été réduites au XVIIIème siècle, sont réintroduites dans cette sixième édition. On écrit donc par exemple : anthropophage, diphthongue, rhythme.
D’Importantes modifications en orthographe grammaticale sont apportées comme l’adoption des lettres « ramistes », de la graphie « voltairienne » en aiavais », au lieu de « avois »), rajout du t dans les pluriels en antenfants » au lieu d’« enfans ») ; mais position conservatrice sur les lettres étymologiques.

Emile Littré propose en 1837 de régularisations et simplifications.

Vers des réformes en Suisse en 1865 et leur répercussion en France

En Suisse s’établit un mouvement de réforme. Dans les cantons de Vaud, Genève, Neuchâtel et Berne sont fondés des Comités phonographiques qui demandent une orthographe rationnelle. En 1867, ces comités se regroupent dans la Société phonographique suisse qui deux ans plus tard devient la Société néographique suisse et étrangère.

Ambroise Firmin Didot, imprimeur, éditeur et helleniste, publie en 1867 ses Observations sur l’orthographe ou ortografie française suivies d’une histoire de la réforme orthographique depuis le XVème siècle jusqu’à nos jours. Dans cet ouvrage, il s’engage pour la perfection de la langue française: il envisage une simplification des lettres étymologiques, des consonnes doubles, des noms composés, l’alignement des désinences –ent en -ant, la suppression de la lettre t prononcée /s/ et remplacée par s, ainsi que la suppression de la lettre x finale et son remplacement par s. Il exige deux lettres différentes pour les sons /g/ et /?/. Il discute ces changements avec Edouard Raoux, président de la Société suisse.

En 1876, la Société néographique suisse devient la Société suisse de réforme orthographique. Elle se charge de soutenir les tentatives de réforme en France et d’en informer les personnes intéressées en Suisse.

En 1863-73, Emile Littré dans son Dictionnaire de la langue française fait des remarques concernant les inconséquences de l’orthographe française et propose des changements ; bien qu’il soit membre de l’Académie française, les académiciens ne soutiennent aucune de ses propositions de réforme.

En 1877-1878, la 7ème édition du Dictionnaire de l’Académie s’assouplit légèrement de son conservatisme et tolère quelques propositions de réforme.

En 1886-87, sur l’initiative des membres de la Phonetic Teachers’ Association et de Paul Passy, la Société de réforme orthographique est formée. Son but est la « simplificacion de l’ortografe Fransaize » et dans ses publications elle adopte une orthographe d’usage réformée.

En 1889-1890, la Société de réforme orthographique soumet une pétition à l’Académie française, qui porte les signatures de 7000 personnes ; elle demande une « simplification de l’orthographe » et énumère les différents thèmes à réformer : suppression d’accents muets (où, là, gîte, qu’il fût) et d’autres signes muets (rythme, fils, faon), le dédoublement et la substitution d’une lettre à deux (honneur, photo), la question de l’uniformité (dixième, dizaine, genoux, fous). Son but est une orthographe phonétique; il le formule ainsi dans le Journal des Débats du 20 avril 1889 :

Le phonétisme pour but idéal, la modération pour règle immédiate.

L’Académie française ne réagit pas à cette pétition.
Michel Bréal, inspecteur général de l’instruction publique de France, souligne l’importance de la langue parlée et de la phonétique pour l’enseignement moderne des langues étrangères. Il soutient des réformes modérées : en première ligne il voudrait éliminer les lettres grecques de l’orthographe française.

Léon Clédat, Docteur ès lettres, veut simplifier les règles de l’accord du participe passé. Il pense que les grammairiens et les philologues devraient initier les réformes et que les manuels de grammaire utilisés dans les écoles devraient entériner ces changements. Selon lui, l’Académie serait seulement chargée du choix entre deux graphies ainsi que de la rédaction du Dictionnaire. Le programme de réforme de Léon Clédat, dans l’orthographe propre à lui, comporte les points suivants :

  1. Remplacer partout par une s l’x final muet ou prononcé comme s.
  2. Ecrire toujours par un z les adjectifs et substantifs numéraus en « zième, zaine »
  3. A l’indicatif présent des verbes en –re, -oir, et –ir, terminer uniformément par une s pure et simple les première et deuzième personnes et par un t la troizième personne du singulier (Voir : les moyens mnémotechniques en conjugaison).
  4. Ne jamais redoubler l’l ni le t dans les verbes en –eler et en –eter.
  5. Ne jamais faire l’accord du participe passé dans les trois cas suivants:
    – 1. Quand le complément direct est le pronom en ;
    – 2. Quand le participe est suivi d’un infinitif sans préposition ;
    – 3. Pour le participe de coûter et de valoir.

En 1891, le Ministre Léon Bourgeois publie une liste de « tolérances » : dans les écoles, les fautes d’orthographe qui concernent les points non élucidés par les grammairiens eux-mêmes, ne doivent plus être sanctionnées ; les enseignants en sont informés par circulaire, de façon plutôt vague, des graphies qui sont soumises aux tolérances.

Création de la section belge de la Société de Réforme orthographique en 1892

En 1892, création de la section belge de la Société de réforme orthographique à laquelle adhèrent 370 membres.

En 1893, l’Académicien Octave Gréard rédige une note sur la simplification de l’orthographe; il critique la circulaire Bourgeois et déclare que l’Académie est la seule assemblée compétente pour les changements orthographiques. La note de Gréard est discutée à l’Académie et acceptée par six voix contre quatre; les 34 autres membres s’abstiennent et la note n’a donc pas de conséquences.

En 1893, André Renard publie La nouvelle orthographe.

En 1894, Léon Clédat publie Gramaire raisonée de la Langue française.

Premières réformes gouvernementales pour la graphie à l’école (au dépens de l’Acédémie Française, fin du XIXèmesiècle)

En 1896, la Société suisse de réforme orthographique se refonde et soutient le mouvement réformiste en France, sans pourtant avoir un propre concept de réforme.
Les Sociétés de réforme orthographique de France, d’Algérie et de Belgique lancent une pétition adressée au Ministre français de l’instruction publique, Émile Combes. Combes charge une commission de 9 personnes d’examiner les simplifications de l’orthographe française qui pourraient être admises dans l’enseignement et dont l’usage serait autorisé dans les examens à tous les degrés. Dix jours après la formation de cette commission, la charge de Ministre de l’instruction publique passe à Alfred-Nicolas Rambaud qui ne convoquera jamais la commission.

En 1900, nouvelle commission : deux membres du Conseil Supérieur de l’instruction publique, Henri Bernès, agrégé des lettres et Paul Clarin, agrégé de grammaire, demandent de former une commission composée de deux membres de chaque degré scolaire – enseignement primaire, secondaire et supérieur – pour « préparer la simplification de la syntaxe française dans les écoles primaires et secondaires ». Le 1er août 1900 les décisions de la commission sont publiées dans le Journal Officiel sous le titre de « Arrêté relatif à la simplification de la syntaxe française ». Il s’agit de tolérer des graphies qui s’éloignent de la norme, c’est-à-dire de ne pas les compter comme des fautes.
En janvier 1900 déjà, l’Académie entre en lice par la voix de Ferdinand Brunetière qui proteste en disant que « c’est la première fois que le gouvernement s’occupe de régenter la langue française et qu’il tient si peu de compte de ce qu’on peut regarder comme un droit de l’Académie ». Deux membres de la commission sont pourtant des académiciens. Le ministre répond « que pas un moment il n’avait eu la pensée de soustraire le travail de la Commission au jugement de l’Académie ». En septembre 1900, l’Académie convoque une commission.

En 1900, Alfred Binet, psychologue, créé la Société libre pour l’étude psychologique de l’enfant et mène des recherches sur la mémorisation, la cacographie et l’épellation.

Entre 1900-1901, Georges Leygues, ministre de l’Instruction publique, prend différents arrêtés ministériels sur les « tolérances » orthographiques, concernant en particulier les accords du participe passé.

Entre 1900 et 1905, une campagne réformiste de l’orthographe est menée et est soutenue notamment par Anatole France.

Campagnes réformistes et opposition de l’Académie Française, vers les blocages…

En 1901, sont publiées les nouvelles décisions de tolérance de l’Académie avec le commentaire : « L’arrêté du 31 juillet 1900 est rapporté. ». Les décisions prises par l ‘Académie visent entre autres l’accord du participe passé : l’arrêté de 1900 préconisait que le participe conjugué avec avoir restait invariable ; l’arrêté de 1901 n’acceptait plus cette liberté et dans le rapport de l’Académie on pouvait lire :
« modifier la règle de l’accord des participes, c’est porter l’atteinte la plus grave à la littérature française toute entière ; c’est reléguer d’un seul coup dans l’archaïsme tous les poètes qui ont écrit jusqu’à ce jour. » En conséquence, l’Académie empêche pratiquement aux élèves d’apprendre les nouvelles graphies : l’arrêté de 1901 ne dit pas comment les graphies en question devraient être enseignées ; les enseignants sont seulement informés par une circulaire des tolérances à appliquer lors des examens.

En 1903, le Petit Larousse publie sous le titre « L’orthographe dans les examens » un article en additif qui comporte les extraits suivants :

L’arrêté ministériel du 26 février 1901 ne réforme pas, ni modifie pas (sic) l’orthographe, comme on a eu et comme on a le tort de le dire. Il n’a d’autre objet que de simplifier l’enseignement de la syntaxe en admettant des tolérances dans les examens ou concours. […] Ainsi donc les règles restent telles qu’elles étaient […] il est par conséquent indispensable qu’elles continuent de figurer dans les grammaires, et il y a utilité à les connaître, car quiconque ne les appliquera pas fera des fautes. La portée essentielle de la décision ministérielle du 26 février, c’est l’obligation où seront les examinateurs de tolérer ces fautes, de ne pas en tenir compte aux candidats.

Le 11 février, le Ministre de l’instruction publique convoque la commission sous la présidence de Paul Meyer, un des signataires de la pétition à l’Académie de 1889. Octave Gréard est le seul académicien qui participe au travail de cette commission qui veut abolir les « consonnes parasites » et préparer la simplification de l’orthographe française.

En 1904, la commission établit son rapport et le Ministre le présente en juillet à l’Académie. Celle-ci discute le rapport et s’y oppose avec, entre autres, le commentaire suivant :
« L’Académie se confesse très attachée à l’orthographe étymologique à laquelle la commission chargée de préparer la simplification de l’orthographe se montre très hostile. »
Pour Paul Meyer la conclusion est claire : « Le grand obstacle à toute réforme, c’est l’Académie française. »

En 1905, la rédaction de la Revue politique et littéraire (Revue Bleue) s’adresse au Ministre de l’instruction publique avec une pétition contre la réforme. Les signataires se basent à nouveau sur la tradition et sur la beauté de la langue. Selon un des signataires de la pétition, les philologues ne seraient pas compétents en orthographe parce qu’ils n’auraient pas de « vive sensualité artistique ». Pour lui, la beauté de la langue est le critère le plus important et il voit comme modèle le travail de Vaugelas au XVIIème siècle.

Ferdinand Brunot rédige une Lettre ouverte à Monsieur le Ministre de l’Instruction publique sur la réforme de l’orthographe. Il s’exprime d’abord sur la question de la compétence : consulter l’Académie, ce serait « un acte de déférence courtoise », mais la décision concernant une réforme serait l’affaire du Ministre ; vu que l’instruction serait concernée en première ligne, le Ministre et le Conseil supérieur devraient décider des matières à enseigner.
Il propose de former une commission composée de linguistes et phonéticiens et s’exprime en faveur d’une orthographe phonétique. La même année est convoquée une commission qui, sur la base des propositions de la commission Meyer et des objections de l’Académie, devrait formuler de nouvelles propositions.

En 1905, Émile Faguet  propose une  Simplification simple de l’orthographe et Paul Meyer rédige un mémoire pour la commission intitulé Pour la simplification de notre orthographe.

En 1906, Brunot soumet le rapport de la commission au Ministre Aristide Briand. Brunot voit de la manière suivante la mise en pratique des propositions :

Et la Commission a décidé, à l’unanimité et dès la première séance, que l’orthographe réformée sera, si le Ministre en décide ainsi, seule enseignée. Le système de tolérance, mis en vigueur en 1900, a été tout à fait inefficace. Ni à l’étranger, ni en France, on n’a su si on devait s’y fier, et si un nouvel arrêté ne viendrait pas supprimer les libertés données. Le résultat a donc été très médiocre.

Les imprimeurs et les éditeurs ne se sentent pas écoutés. Ils s’opposent à l’idée que le ministre soit responsable de la réforme et craignent qu’un changement de ministre provoque une nouvelle proposition de modifier l’orthographe. Ils s’expriment contre « une réforme imposée ». Le Ministre de l’instruction publique ne fait plus rien pour changer l’orthographe.

En 1906, Louis Dutens publie une Etude sur la simplification de l’orthographe.

En 1906, la Fédération internationale des instituteurs demande une réforme des orthographes (Prise de position identique à l’Internationale des Travailleurs dès 1867). Tous les pays d’Europe s’engagent dans des réformes, sauf la France.

En 1907, Marcelin Berthelot, Inspecteur général de l’enseignement supérieur, rédige La réforme de la langue française ; pour lui, la langue est un organisme vivant qui évolue sans que l’Etat puisse la forcer avec des réformes. Il postule que les changements dans l’usage doivent d’abord être tolérés à l’école et que seulement après ils doivent être entérinés par l’Académie ou par une commission. Il trouve que c’est un manque de démocratie de vouloir imposer des changements par l’autorité d’un ministre et une erreur que l’opinion publique ne soit pas prise en considération.

Plusieurs revues paraissent en orthographe réformée, par exemple la Revue de la philologie française, Le Réformiste. Dans la Revue des langues romanes Maurice Grammont s’exprime comme suit :

La seule manière de formuler une règle ortografique qui soit une simplification est la suivante: toutes les fois que tel son se présentera on l’écrira par telle lettre ou tel groupe de lettres, et toute autre transcription sera strictement bannie.

Rémy de Gourmont, dans son livre Le problème du style, considère le travail de la commission Brunot comme raisonnable et il est favorable à une « modification graduelle, très lente, de notre orthographe ». Il pense qu’on doit commencer par la modification d’un seul point et propose la francisation des lettres grecques.

La crise de l’orthographe

En 1911, J. Simon écrit Le péril de la syntaxe et la crise de l’orthographe qui indique la première apparition de « crise de l’orthographe » dans un titre.

En 1914, avec l’éclatement de la première guerre mondiale, toutes les discussions autour d’une réforme de l’orthographe française sont suspendues.

Les tolérances de 1901 ont eu un effet durable, car elles ont été officialisées par un arrêté et sont restées en vigueur jusqu’en 1976.

En 1924, Théodore Simon réalise des expériences de Pédagogie expérimentale sur l’écriture, la lecture, et l’orthographe.

En 1925, une Lettre de la Société nationale de Linguistique au Ministre de l’Instruction publique plaide pour la « régularisation du français »

En 1927, Charles Beaulieux publie son Histoire de la formation de l’orthographe française dans laquelle il met en lumière entre autres le « mal fait dans l’espace de trois siècles par les praticiens » dans l’évolution de l’orthographe française. Il est convaincu que « Notre orthographe est à son apogée au XIIème siècle » et que tout projet de réforme qui ne s’appuie pas sur une connaissance solide de l’histoire de notre orthographe est voué à l’échec.

En 1935, la 8ème édition du Dictionnaire de l’Académie est à visée traditionaliste.

En 1939, Albert Dauzat essaie de relancer dans Le Français moderne la discussion de la réforme de l’orthographe française. Selon lui, c’est l’Académie qui doit changer l’orthographe dans la mesure où le Dictionnaire est « la Bible de tous les typographes ». Il est pour une réforme modérée, menée
« en laissant hors de discussion les principes traditionnels de notre orthographe, et en tenant compte des intérêts légitimes des imprimeurs et des [et qui] réalise la suppression des anomalies et des bévues condamnées en principe, à deux reprises, par l’Académie française.
Jacques Damourette, propose dans les éditions futures du journal « un programme rationnel et modéré de simplification ». Les thèmes les plus importants sont pour Damourette « la suppression de toutes les lettres factices, étymologiques ou non », ainsi que la simplification des consonnes doubles. Pour aboutir à une prononciation correcte. Les propositions adressées à l’Académie ne produisent une fois de plus aucun effet.

En 1944, le Ministre de l’instruction publique charge la Commission d’études pour la réforme de l’enseignement de s’occuper notamment de l’orthographe. Deux professeurs de la Sorbonne, des institutrices et quelques professeurs de l’enseignement secondaire forment la Commission Langevin-Wallon.

En 1945, Odette et Édouard Bled, couple d’instituteurs, publient la première édition des Cours d’orthographe, impliquant des règles strictes et des listes d’exceptions.

Dictionnaire orthographique et grammatical de André Sève et Jean Perrot: ORTHO.
Dictionnaire orthographique et grammatical de André Sève et Jean Perrot: ORTHO.

En 1946-1947, André Sève et Jean Perrot publient ORTHO, un manuel de référence des typographes.

En 1947, la Commission Langevin-Wallon rédige une proposition de réforme ; elle recommande l’adoption dans les plus brefs délais et estime que la réforme ne pourra être effectivement réalisée que si elle devient la règle et est imposée à ce titre à toutes les publications. Le rapport de la commission sera publié dans la même année ; en revanche, les propositions qui concernent environ 20 secteurs problématiques, ne seront jamais publiées.

En 1948, le Projet Peraot-Bruneau propose une réforme radicale.

En 1949, Joseph Hanse publie Dictionnaire des difficultés grammaticales et lexico-logiques.

En 1949, Albert Pirenne édite le Programme d’orthographe d’usage en suivant la pédagogie de Raymond Buyse: l’expérimentation par la pédagogie.

En 1950, le Ministre de l’instruction publique demande au président du Conseil supérieur de convoquer une commission concernant la simplification de l’orthographe française. 18 mois plus tard, son rapport est présenté : Les consonnes (consonnes doubles, consonnes parasites, la consonne finale x, la consonne g), lettres grecques, représentation du son « an », quelques signes (l’accent circonflexe, l’accent grave, le tréma), la conjugaison, alignements et simplifications de détail, règles et accords grammaticaux. Les changements demandés par la commission vont plus loin que les propositions de Dauzat et Beaulieux.

Poursuite de l’idée de réformer et prises de position dans la presse et dans les milieux intellectuels

En 1952, le Conseil supérieur décide que la commission est tenue de continuer son travail. Des critiques ont été formulées au sein du Conseil. De plus, l’Académie française s’oppose aux propositions principalement parce qu’elle n’a pas été consultée.
La question est vivement discutée dans la presse. Le Figaro se prononce plutôt contre la réforme ; Le Monde considère que l’opposition de l’Académie est justifiée ; Le Figaro Littéraire s’y oppose avec le titre « Les trois quarts de nos lecteurs contre la réforme de l’orthographe ». « Je ne veux pas qu’on abîme les mots » écrit Colette et Paul Claudel intitule son article : « Je suis contre » ; beaucoup d’articles pour ou contre la réforme paraissent, même en province.

En 1953, avec un projet de conciliation, Albert Dauzat essaie de promouvoir la réforme même sans le consensus de l’Académie. Dans la même année, Charles Beaulieux propose, entre autres, la suppression des 7 pluriels en –oux et la généralisation de tous les pluriels en s au lieu de x, la suppression des consonnes doubles quand elles ne sont pas prononcées (ex. : déçament pour décemment, fame pour femme), la suppression des erreurs d’étymologie (ex. : un pois pour poids, le boneur) ainsi que celle de quelques consonnes parasites (ex. : asme pour asthme, grèque pour grecque).

Charles Beaulieux publie Projet de simplification de l’orthographe actuelle et de la langue, par le retour du « bel françois » du 12e siècle.

En 1960, 70 membres de l’Académie des Sciences envoient au Secrétaire perpétuel de l’Académie française et au Ministre de l’instruction publique une lettre qui exprime un « voeu en faveur d’une réforme restreinte de l’orthographe française » qui se réfère à l’article de Aristide Beslais de 1957 publié dans L’Éducation nationale. L’Académie ne réagit pas tandis que le Ministre charge Aristide Beslais de former une Commission d’études.

Entre 1961 et 1964, la commission travaille sur la base des questionnaires de Aristide Beslais et d’enquêtes menées dans des écoles de Besançon, Paris et Toulouse. Son but est « de faire essentiellement quelque chose de pratique. » Pendant les travaux, pour préparer le public, plusieurs articles sont publiés dans L’Education nationale et le thème est également traité à la radio et à la télévision.

L’importance militante de la pédagogie dans la révolution de l’orthographe

En 1964 est élaborée l’échelle Dubois-Buyse d’orthographe usuelle du français. Il s’agit d’un outil pédagogique qui permet d’élaborer des exercices d’orthographe usuelle.
Cette échelle est très bien expliquée sur cette page.

En 1965, Beslais rend le rapport de la commission au Ministre de l’instruction publique, Christian Fouchet. Il comporte aussi une planification temporelle de la mise en pratique de la nouvelle orthographe. La Société des gens de lettres rédige une résolution contre la réforme et l’adresse à la presse. Pour elle la réforme est une menace. Après trois ans et demi de travail, il n’y a aucune réaction du Ministre et de l’Académie.

En 1966, le Ministre de l’instruction publique charge le pédagogue et grammairien Réné Thimonnier de rédiger ses Principes d’une réforme rationnelle de l’orthographe lui promettant de les soumettre à l’Académie française. Thimonnier pour sa part les envoie à environ 30 spécialistes français. L’un d’eux propose de soumettre les Principes au Conseil international de la langue française (CILF) pour assurer la participation de toute la francophonie à ce projet. Le CILF les discute ensuite pendant trois ans.

En 1967, René Thimonnier publie Le système graphique du français et y expose son projet de régularisations. Il bénéficie d’appuis officiels.

En 1969, Claire Blanche-Benveniste et André Chervel, linguistes, rédigent L‘orthographe. Un plaidoyer pour une « révolution orthographique ».

Toujours en 1969, André Martinet publie Le Français sans fard (compte-rendu ici)

Durant la période 1969-1970, René Thimonnier propose de nouvelles méthodes pédagogiques. Elles se basent sur les nouvelles connaissances linguistiques. Il trouve que :

Notre système d’écriture est, quoi qu’on dise, beaucoup moins incohérent qu’il ne paraît. Si l’on part d’une étude objective du système, on constate en revanche que ce n’est pas ce système qu’il convient de réfomer, mais la manière dont on l’enseigne.

Le problème majeur de l’orthographe française se poserait au niveau des « homonymies partielles » (ex. : honorer, honneur ; inodore, innombrable), tandis que les « homonymies totales » (martyr, martyre ; cuisseau, cuissot) ne poseraient pas de problèmes. Pour résoudre les problèmes plus saillants, Thimonnier établit son « étude systématique ». Dans ce système, il classe le vocabulaire en « séries analogiques » qui séparent par exemple honneur et honorer en deux séries différentes, selon leurs bases honn- et honor-. Le mérite de Thimonnier est d’avoir mis en avant les éléments morphologiques dans ses théories, éléments qui étaient négligés des phonéticiens.

En 1970, l’Association des Enseignants de Français publie le Manifeste de Charbonnières qui propose une rénovation de l’enseignement du Français.

Entre 1970-1974, la Commission ministérielle Emmanuel sur l’enseignement du français est mise sur pied.

En 1972, les propositions définitives sont remises au Ministre de l’instruction publique qui les adresse à l’Académie.

En 1973, Nina Catach, historienne du langage et linguiste réalise une table ronde au CNRS sur la structure de l’orthographe française. Ils adoptent 14 principes.

En 1973, Joseph Hanse remet un rapport de propositions au Ministre de l’Education.

Entre 1973 et 1975, une commission de l’Académie (animée par J. Mistier) met au point des « recommandations ».

En 1974, Marie de Maistre introduit dans son ouvrage Pour l’orthographe ou contre l’orthographe, la notion de dysorthographie.

En 1975, l’Académie rédige une liste des rectifications qu’elle soumet au Ministre afin qu’il la fasse parvenir aux enseignant(e)s. Le ministre, de son côté, ne fait rien.

En 1975, la « Loi relative à l’emploi de la langue française », est publiée au Journal officiel le 31 décembre 1975 et indique des règles modérées et la lutte contre l’anglicisme.

En 1976, la traduction française d’un ouvrage russe de 1952 de Vladimir Grégoriévitch Gak destiné aux professeurs soviétiques de français, intitulé L’orthographe a un effet retentissant. cet ouvrage se base sur une analyse de la structure du français et dénoue le complexe de principes phonétique, traditionnel, morphologiue, étymologique et différenciatif. Il écrit:

 L’idéal de l’écriture alphabétique serait qu’à chaque son (phonème) corresponde une lettre (graphème) distincte et que, réciproquement, chaque lettre ne possède qu’une seule valeur phonétique. En fait une telle concordance s’observe rarement dans les systèmes graphiques existants. Mais on peut dire (en forçant un peu) qu’en français l’inobservation de ce principe est presque de règle.

En 1976, l’Académie accepte certaines des rectifications proposées dans le rapport Hanse.

En 1977, René Haby, Ministre de l’Education Nationale prend un arrêté ministériel sur les « tolérances grammaticales ou orthographiques » aux examens et aux concours.

Multiplication d’initiatives au milieu des années 1980 et début des enquêtes et des sondages populaires

En 1983, Nina Catach crée de l’« Association pour l’Information et la Recherche sur les Orthographes et les systèmes d’Ecriture » (AIROE).

En 1984, Yvette Roudy, Ministre des Droits de la femme, crée la Commission de terminologie Groult pour la féminisation des noms de métiers et de fonctions (à l’exemple du Québec).

En 1985, le groupe AIROE (Association pour l’information et la recherche sur les orthographes et les systèmes d’écriture) envoie un tract sous le titre : Simplifions ! à des écrivains, enseignants et publicistes. Le groupe, NEOS, publie un bulletin concernant les thèmes « uzaje é perfeksoneman de l’ortogafe rasionalizé » ; de même, l’ADEC (Association pour le droit d’utiliser une écriture commode) revendique « Le Droi d’ékrir(e)/éqrir(e) kom/qom on pronons(e) » ; différents professeurs et enseignant(e)s se réunissent dans l’ICEM (Institut Coopératif de l’Ecole Moderne) qui publie L’Educateur, et qui forme une Commission nationale réforme de l’orthographe qui s’engage pour une « ortografe populère ». Toutes ces initiatives n’atteignent pas le grand public et restent donc sans effet pratique.
Le SNI-PEGC (Syndicat national des instituteurs et professeurs d’enseignement général des Collèges) lance un questionnaire dont les résultats sont publiés dans L’école libératrice. Des 1150 réponses obtenues, 90% sont favorables à une réforme : 85% s’expriment en faveur de la dégémination, 86% pour une réforme des accents, 70% veulent supprimer les lettres grecques.

En 1986, L’Académie entérine les rectifications décidées en 1975 dans son premier fascicule de la neuvième édition du Dictionnaire, mais les annule un an plus tard, avant l’impression du deuxième fascicule. Avec une seule exception (déciller), toutes les graphies de la huitième édition du Dictionnaire sont de nouveau en vigueur.

En 1988, l‘école libératrice, journal du SNI, publie un sondage effectué auprès des instituteurs : 90 % d’avis favorables à une réforme.

En 1989, un appel de linguistes est lancé pour moderniser l’écriture du français.

Toujours en 1989, Le Monde publie le Manifeste des Dix, un appel pour « Moderniser l’écriture du français ». Les Dix sont dix linguistes, membres de AIROE ou liés à ce groupe.
Le magazine Lire lance une enquête sous le titre « Faut-il réformer l’orthographe ? ». Des 900 réponses obtenues, 70% des interrogés considèrent l’orthographe française comme difficile, 86% adhèrent à l’opinion qu’elle est un art, 78% voient dans l’orthographe « un des charmes de la langue française ».
De plus, en ce qui concerne les rectifications proposées, les opinions diffèrent : voici quelques questions et réponses :

Seriez-vous d’accord… oui non
pour que l’on supprime les accents circonflexes ? 44% 52%
pour que l’on supprime le doublement de consonnes ? 40% 56%
pour que l’on supprime les traits d’union ? 37% 59%
pour que l’on remplace les « ph » par un « f » ? 33% 63%
pour qu’un mot puisse s’écrire de deux façons différentes ? 32% 65%
pour que l’on remplace le « x » par le « s » au pluriel de certains mots en « ou » ? 32% 65%
(les différences au 100% sont dues aux abstentions)

 

Quant à la question de la compétence, une majorité de 36% considère que c’est l’Académie qui doit promouvoir une réforme, 27% trouvent que c’est le Ministère de l’Education nationale, 11% pensent que ce sont les écrivains, 9% le Petit Larousse et le Petit Robert et 5% le Ministère de la Culture.

1990: l’Académie approuve à l’unanimité des propositions de réforme de l’orthographe

Une démarche est entamée par le Premier Ministre Michel Rocard : il charge le Conseil supérieur de la langue française de rédiger des propositions de réforme concernant les thèmes suivants : le trait d’union, le pluriel des mots composés, le circonflexe, le participe passé des verbes pronominaux, diverses anomalies

En 1990, les propositions sont discutées avec la commission du Dictionnaire de l’Académie. En mai, le projet est soumis à l’Académie française qui l’approuve à l’unanimité. C’est donc la première fois qu’une réforme de l’orthographe élaborée à l’extérieur de l’Académie française est acceptée de celle-ci !

Pour mettre en pratique ces rectifications, le Conseil envisage le procédé suivant :

Pour être efficace, une politique de la langue doit rechercher la plus large participation des acteurs de la vie sociale, économique, culturelle, administrative. Comme l’a déclaré le Premier Ministre, il n’est pas question ici de légiférer. Les édits linguistiques sont impuissants s’ils ne sont pas soutenus par une ferme volonté des institutions compétentes et s’ils ne trouvent pas dans le public un vaste écho favorable. C’est pourquoi nous souhaitons d’une part que les présentes propositions soient enseignées aux enfants – la nouvelle orthographe étant la règle, l’ancienne (l’actuelle) étant tolérée. C’est pourquoi nous souhaitons d’autre part qu’elles soient recommandées aux adultes, et en particulier à tous ceux qui pratiquent avec autorité et rayonnement, consignent, codifient et commentent la langue écrite. […] Les présentes propositions trouveront à s’appliquer au premier chef dans trois domaines précis : la création de mots nouveaux, en particulier dans les domaines scientifiques et techniques, la confection de dictionnaires, et l’enseignement.

En décembre, les rectifications sont publiées dans les Documents administratifs du Journal Officiel. Une marée d’articles paraissent qui tend du côté des voix réfractaires aux rectifications, en première ligne le Figaro. Un des opposants les plus fervents est François Bayrou ; pour lui « cette réforme de l’orthographe est un problème de protection des citoyens devant la toute-puissance des pouvoirs » ; il crée ainsi une association qui a pour vocation de résister à l’arbitraire et de défendre la liberté de la langue.

En 1991, le directeur des séances de l’Académie informe les journalistes le 10 janvier que « L’Académie n’a pas terminé ses discussions ». « Selon une procédure qu’elle a souvent mise en oeuvre, elle souhaite que ces simplifications et unifications soient soumises à l’épreuve du temps, et elle se propose de juger, après une période d’observation, des graphies et emplois que l’usage aura retenus. »
Après cette prise de position – qu’on peut désormais considérer comme habituelle de la part de l’Académie – Larousse, Hachette et Le Robert décident de ne pas entériner les rectifications dans leurs publications, mais de les faire paraître « à titre d’information et de curiosité » en appendice.
La situation ressemble donc fortement à celle de 1975 où les rectifications ne sont jamais passées dans l’usage du grand public.

En 1991, La 9ème édition de son Dictionnaire procède à une révision graphique en fonction des rectifications en cours.

En 1991, Nina Catach publie le Lexique orthographique des mots rectifiés.

Fin du second millénaire, le franglais gagne du terrain !

Cet article a été écrit à l’origine par Rocbo (lien vers son site en-dessous), il l’a gentillement offert à JeRetiens et des ajouts ont été réalisés (mise en forme, détails bio et bibliographiques, images et extraits des oeuvres originales, approfondissement de certains points) par Sam Zylberberg. Un travail passionnant !

Chronologie établie à partir de Repères pour une histoire des réformes orthographiques
de Luce PEHTJEAN et de Maurice TOURNIER et du mémoire de licence Les réformes de l’orthographe française. Une approche historique, contrastive et prospective de Myrta Giovanoli

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Préparez-vous à vous creuser les méninges avec une énigme classique de logique qui piège souvent les esprits les plus vifs : celle du nénuphar géant ! Il grandit, grandit, et grandit jusqu’à occuper toute la surface d’un étang. Arriverez-vous à déjouer le piège ?

Sommaire de l'article :

Énoncé

Un nénuphar se trouve dans un étang, chaque jour il double de taille.
Il recouvre la totalité de l’étang en un mois (30 jours).
Quel jour le nénuphar aura-t-il couvert précisément la moitié de l’étang ?

Réfléchissez un peu et ensuite passez à la solution !

Solution

Vous avez répondu 15 jours ? Raté ! La bonne réponse est 29 jours !

Tâchons de comprendre !

La croissance du nénuphar dépend de sa taille la veille. Le deuxième jour, il fait le double du premier (et il était minuscule) mais plus il est grand, plus il grandit. C’est pourquoi c’est seulement la avant dernier jour que le nénuphar couvre la moitié de l’étang, car le dernier jour il le recouvre entièrement.

La logique mathématique derrière l’énigme du nénuphar est celle des exponentielles, et c’est pour ainsi dire la clef de cette énigme. Le nénuphar double de taille chaque jour. Cela signifie que, si le nénuphar atteint la totalité de l’étang le 30ème jour, alors le jour juste avant (le 29ème jour), il était forcément à la moitié de sa taille finale. Le lendemain, en doublant, il occupe la totalité !

C’est une illustration parfaite de la puissance des fonctions exponentielles : une croissance qui semble lente au début mais qui s’accélère de manière fulgurante à la fin. Chaque jour compte énormément !

Variante

L’énigme du nénuphar peut être racontée de différentes manières et avec des données supplémentaires, mais sa résolution suit toujours le même principe.
Voici une variante avec deux nénuphars !

Un nénuphar double de taille tous les ans. 10 ans plus tard il recouvre l’intégralité de l’étang.
Si deux nénuphars étaient présents au départ, quand aurait été recouvert l’étang en entier ? 5 ans ? Raté !

La réponse est 9 ans évidemment, car à la huitième année chaque nénuphar couvre un quart de l’eau, et en doublant de taille la neuvième année ils occupent chacun 50% de l’étang !

 

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Le dire à haute voix ne vous engage pas, mais dès qu’il s’agit de l’écrire… les doutes surgissent ! Comment écrit-on « autant pour moi » ou « au temps pour moi » et que veut exactement dire cette expression ?
A travers cet article, nous retracerons l’Histoire de cette expression, ses premières apparitions écrites et l’évolution de son orthographe.

L’orthographe correcte est au temps pour moi

Dissipons tout de suite les doutes, on écrit au temps pour moi. Cette expression signifie une reconnaissance d’erreurs commises par celui qui parle (ou qui écrit). C’est la seule orthographe admise par l’Académie française. Cependant, il est très courant de lire « autant pour moi » pour désigner cette même expression.
Certains grammairiens sont même pour cette orthographe et nombreux en font usage.

Tâchons de comprendre !

Différence entre au temps pour moi et autant pour moi

Tout d’abord, intéressons-nous à la différence de sens qu’il peut y avoir entre les deux locutions.

Au temps pour moi désigne, comme nous l’avons indiqué, une reconnaissance d’erreur de la part du locuteur.
Autant pour moi désigne également une reconnaissance d’erreur mais par extension se réfère à « autant d’erreurs que l’on peut mettre à mon actif », il s’agit donc d’un rapport à une quantité.

Étymologie de au temps pour moi

Comme nous l’exposons souvent sur JeRetiens, c’est la plupart du temps dans l’étymologie qu’il faut trouver les sources de compréhension actuelles d’un mot et de son évolution cohérente.

L’expression « au temps » apparaît dans le jargon militaire au cours de XIXème siècle. Cette locution signifie qu’un soldat n’est pas dans le temps lorsqu’il réalise un mouvement et que la manœuvre doit être recommencée. Les exemples les plus courants sont ceux du salut militaire qui si mal coordonné donne une impression de désordre dans les rangs.

Adjoindre à au temps, pour moi indique que le locuteur reconnaît la faute. L’expression au temps se figure donc en au temps pour moi.

Première occurrence littéraire de au temps

La première apparition littéraire de « au temps » se trouve dans Le Train de 8h47 de Georges Courteline en 1888. L’utilisation de l’expression est fidèle à son origine militaire et désigne des mouvements ratés, comme l’indique cet exemple:

Recommencez-moi ce mouvement-là en le décomposant. Au temps ! Au temps ! Je vous dis que ce n’est pas ça !

Première apparition littéraire de au temps pour moi et début des différences orthographiques

La première apparition littéraire de l’expression complète au temps pour moi est très intéressante. En 1892, dans la revue La Caricature, Jacques de Garches écrit une nouvelle intitulée Psitt ! Perruquier ! Conte régimentaire, dans laquelle on retrouve cette phrase dans la bouche d’un lieutenant:

D’ailleurs, au temps pour moi : maladresse !

Sa nouvelle est rééditée six ans plus tard dans La Petite Caricature en 1898, et c’est là que cela devient intéressant: au temps pour moi est remplacé par autant pour moi.

C’est le début des controverses qui durent encore… 120 ans plus tard !

Dès 1902, l’occurrence autant pour moi est écrite en l’état dans un feuilleton de Paul Reboux intitulé Josette et publié dans Le Journal.

Elle n’est pas là, pensa-t-il. Autant pour moi… Ma foi, allons-y tout de même !

S’en suivront différentes publications qui alterneront les graphies: au temps et autant pour moi, en fonction des écrivains ou des éditeurs, au départ toujours dans le domaine militaire, ensuite l’expression entrant dans le siècle et dans la société civile.

Vers des querelles orthographiques… et de grammairiens ?

Est-ce qu’une expression écrite de deux manières différentes et voulant dire à peu près la même chose (même si le sens grammatical diffère un peu) peut engendrer des querelles ? Mais évidemment !

Tout d’abord, l’étymologie de au temps pour moi est incertaine mais rien ne justifie l’usage de autant pour moi  si l’on se réfère à l’Académie Française qui indique:

Il est impossible de savoir précisément quand et comment est apparue l’expression familière au temps pour moi, issue du langage militaire, dans laquelle au temps ! se dit pour commander la reprise d’un mouvement depuis le début (au temps pour les crosses, etc.). De ce sens de C’est à reprendre, on a pu glisser à l’emploi figuré. On dit Au temps pour moi pour admettre son erreur – et concéder que l’on va reprendre ou reconsidérer les choses depuis leur début.

L’origine de cette expression n’étant plus comprise, la graphie Autant pour moi est courante aujourd’hui, mais rien ne la justifie.

Point de vue de l’Académie Française sur « au temps pour moi« 

Durant le XXème siècle, de nombreux grammairiens ont analysé cette expression et certains ont même pris parti, voire milité pour une graphie au dépens d’une autre. Ce qui revient de l’analyse des grammairiens et qui constitue une remarque quasi générale est que autant pour moi apparaît comme une altération de au temps pour moi.
Si l’étymologie demeure incertaine pour l’Académie Française, cette dernière au même titre que les grammairiens Maurice Grevisse, son gendre (ayant repris son œuvre) André Goose, ou encore Le Petit Robert tiennent pour seule orthographe valable au temps pour moi.

La question militante se pose sur l’aspect pédant attribué à au temps pour moi par des écrivains comme André Thérive et sur la forme plus légère voire auto-dérisoire de autant pour moi à privilégier, comme l’écrit l’historien du langage Claude Duneton dans le Figaro Littéraire du 18 décembre 2003:

Autant pour moi est une locution de modestie, avec un brin d’autodérision. Elle est elliptique et signifie : Je ne suis pas meilleur qu’un autre, j’ai autant d’erreurs que vous à mon service : autant pour moi. La locution est ancienne, elle se rattache par un détour de pensée à la formule que rapporte Littré dans son supplément : Dans plusieurs provinces on dit encore d’une personne parfaitement remise d’une maladie : il ne lui en faut plus qu’autant […] elle n’a plus qu’à recommencer.

Conclusion: faut-il écrire au temps pour moi ou autant pour moi ?

La bonne orthographe est au temps pour moi ! Vous respectez ainsi Le Français correct de Grevisse et les recommandations de l’Académie Française.

Si vous écrivez autant pour moi, il est encore temps de revoir votre orthographe ou alors de l’assumer et d’adopter un point de vue… militant !

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