Les idées reçues sur l’évolution

Il existe de nombreuses méconnaissances ou idées reçues sur l’évolution, notamment sur la signification du mot théorie, sur la façon dont les individus évoluent et sur l’origine de la vie.

Bien que la théorie de l’évolution ait suscité la controverse lorsqu’elle a été proposée pour la première fois, elle a été presque universellement acceptée par les biologistes dans les 20 ans qui ont suivi la publication de On the Origin of Species (L’Origine des espèces). Néanmoins, la théorie de l’évolution est un concept difficile et des idées fausses ou reçues à son sujet abondent.

L’évolution n’est qu’une théorie

Les critiques de la théorie de l’évolution rejettent son importance en confondant délibérément l’usage populaire du mot théorie avec la façon dont les scientifiques utilisent le mot. En science, une théorie est comprise comme un ensemble d’explications testées et vérifiées de manière approfondie pour un ensemble d’observations du monde naturel. Les scientifiques ont une théorie de l’atome, une théorie de la gravité et une théorie de la relativité, chacune d’entre elles décrivant des faits compris sur le monde. De même, la théorie de l’évolution décrit des faits sur le monde vivant. Une théorie scientifique a également survécu aux efforts considérables déployés par les scientifiques pour la discréditer. Ce qui fait d’une théorie scientifique une théorie valable, c’est qu’elle est adoptée suite à un consensus, lui-même issu de débats, de symposiums, etc.
En revanche, une théorie dans le langage courant est un mot qui signifie une supposition ou une explication suggérée ; cette signification est plus proche du concept scientifique d’hypothèse. Lorsque les critiques de l’évolution disent que l’évolution est juste une théorie, ils sous-entendent qu’il y a peu de preuves de l’évolution et qu’elle est encore en train d’être rigoureusement testée. C’est une mauvaise interprétation.

Les individus évoluent

L’évolution est le changement de la composition génétique d’une population au fil du temps, plus précisément au fil des générations, résultant de la reproduction différentielle d’individus présentant certains allèles. Les individus changent au cours de leur vie, évidemment, mais cela s’appelle le développement et implique des changements programmés par l’ensemble des gènes que l’individu a acquis à la naissance en coordination avec son environnement. Lorsque l’on réfléchit à l’évolution d’une caractéristique, il est probablement préférable de penser à la modification de la valeur moyenne de la caractéristique dans la population au fil du temps. Par exemple, lorsque la sélection naturelle entraîne une modification de la taille du bec chez les pinsons des Galápagos, cela ne signifie pas que le bec des individus change. Si l’on mesure la taille moyenne du bec de tous les individus de la population à un moment donné, puis que l’on mesure la taille moyenne du bec de cette population plusieurs années plus tard, cette valeur moyenne de la population sera différente en raison de l’évolution.

L'évolution de la taille de becs des pinsons de Darwin après la sécheresse
Étudiés depuis 1973, les pinsons des Galápagos ont permis de mettre en évidence des évolutions dues à la sélection naturelle suite à des changements environnementaux, soit la sécheresse de 1977 qui a eu pour conséquence l’augmentation de la taille du bec de ces oiseaux car un bec plus large leur permet de manger des graines enveloppées d’une coquille fort résistante (qui elles-mêmes avaient survécu à la sécheresse).

L’évolution explique l’origine de la vie

C’est un malentendu courant que l’évolution inclut une explication des origines de la vie. La théorie de l’évolution explique comment les populations changent au fil du temps. Elle ne fait pas la lumière sur les débuts de la vie, y compris les origines des premières cellules, qui sont la façon dont la vie est définie. Les mécanismes de l’origine de la vie sur terre sont un problème particulièrement difficile parce qu’il s’est produit il y a très longtemps et, vraisemblablement, il n’est survenu qu’une fois. Cependant, si l’évolution n’explique pas l’origine de la vie, elle peut avoir un rôle à jouer dans certains des processus qui se déroulent une fois que les entités pré-vivantes ont acquis certaines propriétés. Une fois qu’un mécanisme d’héritage a été mis en place sous la forme d’une molécule comme l’ADN, soit dans une cellule, soit dans une pré-cellule, ces entités seraient soumises au principe de la sélection naturelle. Des reproducteurs plus efficaces augmenteraient la fréquence au détriment des reproducteurs inefficaces.

Les organismes évoluent à dessein

Des déclarations telles que les organismes évoluent en réponse à un changement dans l’environnement peuvent conduire au malentendu selon lequel l’évolution est en quelque sorte intentionnelle. Un environnement modifié fait que certains individus de la population, ceux qui présentent des phénotypes particuliers, en bénéficient et, par conséquent, produisent proportionnellement plus de descendants que les autres phénotypes. Il en résulte un changement dans la population si les caractéristiques sont déterminées génétiquement.

Il est important de comprendre que la variation sur laquelle s’opère la sélection naturelle est déjà présente dans une population et ne survient pas en réponse à un changement environnemental. Par exemple, l’application d’antibiotiques à une population de bactéries va, avec le temps, sélectionner une population de bactéries qui sont résistantes aux antibiotiques. La résistance, qui est causée par un gène, n’est pas le résultat d’une mutation génétique due à l’application de l’antibiotique. Le gène de la résistance était déjà présent dans le pool génétique des bactéries, probablement à une faible fréquence. L’antibiotique, qui tue les cellules bactériennes sans le gène de résistance, sélectionne fortement les individus qui sont résistants, car ce sont les seuls qui ont survécu et se sont divisés. Des expériences ont démontré que les antibiotiques ne provoquent pas de mutations pour la résistance aux antibiotiques.

Dans un sens plus large, l’évolution n’est pas orientée vers un but précis. Les espèces ne deviennent pas meilleures au fil du temps. Elles suivent l’évolution de leur environnement grâce à des adaptations qui maximisent leur reproduction. Les caractéristiques qui évoluent chez une espèce sont fonction de la variation préexistante et de l’environnement, qui changent tous deux constamment de manière non directionnelle. Un trait qui est adapté à un environnement à un moment donné peut également être fatal à un moment donné dans l’avenir.

Évolution = sélection naturelle

Les termes évolution et sélection naturelle sont souvent confondus, car les deux concepts sont étroitement liés. Ils ne sont cependant pas synonymes. La sélection naturelle fait référence au processus par lequel des organismes mieux adaptés à leur environnement ont plus de chances de survivre et de produire une descendance, ce qui permet de faire proliférer des génotypes favorables dans une population. L’évolution est définie plus largement comme toute modification de la composition génétique d’une population au fil du temps. Comme l’a expliqué Darwin, la sélection naturelle est un des principaux moteurs de l’évolution, mais ce n’est pas le seul.

La dérive génétique, par exemple, est un autre mécanisme par lequel l’évolution peut se produire. La dérive génétique se produit lorsque la fréquence des allèles est modifiée en raison d’un échantillonnage aléatoire. Il s’agit d’une évolution par hasard, et plus la population est petite, plus les effets sur la distribution génétique dus à une erreur d’échantillonnage sont importants. Par exemple, un goulot d’étranglement démographique, qui se produit lorsqu’un événement tel qu’une catastrophe naturelle réduit considérablement la taille d’une population, peut entraîner l’élimination ou la réduction significative d’un caractère au sein d’une population, indépendamment de l’importance de ce caractère pour la survie ou la reproduction. Ainsi, l’évolution peut se faire sans sélection naturelle.

 

Sam Zylberberg

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