Les stéréotypes ont la vie dure. Et ceux concernant le vignoble du Beaujolais ne font pas exception. Si on faisait un sondage sur l’image des vins du Beaujolais, fort est à parier que bien peu de consommateurs attribueraient des vertus à notre gamay favori. Les mots qui viendraient à l’esprit seraient plutôt « glou-glou » ou encore « vin de copains » sans forcément oublier l’ironie en s’interrogeant sur le fait de savoir si l’on peut ranger le breuvage local dans la catégorie « vin ».
L’impact du beaujolais nouveau
Bien évidemment, le fameux beaujolais nouveau est passé par là. Et il a laissé des traces dans l’esprit du consommateur. Les autochtones ne sont pas les moins critiques au sujet des vins du Beaujolais. Souvent d’ailleurs, le singulier s’impose dans le propos du dégustateur lambda. Il y aurait ainsi UN vin du Beaujolais seul et unique. Notons d’ailleurs qu’il existe une confusion (enrichie par la phonétique) entre le beaujolais (vin) et le Beaujolais (vignoble). Cela renforce cet aspect d’unité pour ne pas dire d’unicité.
En outre, le beaujolais nouveau a été d’un tel poids marketing qu’un esprit peu coutumier de la chose bachique peut facilement, confusément (et donc bien trop rapidement) associer le vin du Beaujolais au seul et unique beaujolais nouveau. Ainsi, il en ressortira chez beaucoup un intérêt très modéré (dans le meilleur des cas) voire le dégoût ou l’ironie comme mentionné précédemment.
Le Beaujolais fait sa révolution
Et pourtant, le vignoble du Beaujolais, ses vignerons ont entamé depuis plusieurs années maintenant une véritable révolution. Quoi de neuf en Beaujolais ? pourrait-on s’interroger.
Du neuf pour le beaujolais nouveau
Tout d’abord, signalons que le beaujolais nouveau actuel n’a rien à voir avec le beaujolais nouveau qui se faisait il y a une dizaine ou une quinzaine d’années. La crise du vignoble beaujolais dans son ensemble (années 1990 – 2000) est passée par là. Une nouvelle génération de vignerons s’est progressivement installée. Une meilleure connaissance technique associée à des pratiques culturales moins excessives a favorisé dans l’ensemble une renaissance du beaujolais nouveau. Celui-ci est devenu de belle qualité chez bon nombre de vignerons. Et c’est tant mieux ! Qui s’en plaindrait ? Bien souvent, les vins associent désormais une belle maturité, une rondeur gourmande, le tout équilibré par une fraîcheur salivante. Le vin témoigne de cet esprit simple, gourmand et facile que l’on aime partager en toute occasion du quotidien, qui appelle la chaleur et la convivialité des proches. Un « vin de copains » comme on aime à dire.
Question de terroir
Mais l’histoire du renouveau du vignoble du Beaujolais est trop belle pour s’arrêter là. En effet, dans leur volonté de monter en gamme, les vignerons ses sont mis à (re)découvrir leur terroir. Une vaste étude réalisée sur plusieurs années, portant sur l’identification des différents types de sols, a été menée avec précision et rigueur. Un travail riche d’enseignements. Plus de 300 types de sols ont été mis au jour.
Les lieux-dits (notamment sur les dix crus du Beaujolais) ont commencé à être mis en valeur et à être vinifiés séparément. Cette approche « parcellaire » à l’égal de ce qui se fait depuis bien longtemps dans le vignoble bourguignon se veut marqueur de qualité. La montée en gamme des vins est en marche. D’ailleurs, on peut noter sur un plan marketing, que cela s’accompagne d’une identification de ces lieux-dits sur les étiquettes des bouteilles.
En travaillant ainsi, le vigneron peut mieux révéler le terroir de ses vignes, mieux mettre en valeur ses spécificités et adapter ses pratiques culturales et de vinification. La spécificité des sols et sous-sol évoquée plus haut mais aussi la topographie (qui est importante en Beaujolais avec parfois des pentes conséquentes), sans oublier l’exposition et l’altitude évidemment ; tous ces éléments sont à prendre en considération.
Ainsi, progressivement, on s’est rendu compte que le gamay pouvait vieillir et bigrement bien. Ce cépage a également la capacité de supporter un élevage sous-bois quand ce dernier est adapté et est fait sans excès démonstratif. Le gamay n’est pas non plus un cabernet-sauvignon.
Le Beaujolais et ses ambassadeurs
Petit à petit les vins de gastronomie en Beaujolais se sont manifestés. Ils sont tout d’abord apparus sur les tables des grands établissements gastronomiques parisiens / londoniens / new-yorkais. Des sommeliers de renom les ont mis en valeur dans leur établissement. La presse spécialisée s’en est faite l’écho. Les blogs des amateurs ont suivi.
Ces beaujolais de gastronomie, de terroir sont issus majoritairement des dix crus du Beaujolais (partie Nord du Vignoble). Certains noms sont particulièrement propices à mettre en valeur leur aspect gastronomique. On citera par exemple, Moulin à Vent, Fleurie, Morgon, Côte de Brouilly. Cette liste n’est en rien exhaustive. En effet, certains vins AOC beaujolais-villages voire AOC beaujolais peuvent se retrouver parfaitement sur des tables de bistronomie dans un esprit un peu canaille.
Qu’est-ce qu’un vin de Gastronomie ?
Mais finalement, un vin de gastronomie c’est quoi ? Pour faire simple, on peut dire qu’un vin de gastronomie est un vin qui accompagne et sublime un plat et qui se laisse sublimer par lui en retour. Il y a une osmose qui se crée (1+1=3). Il est donc capable de faire montre de complexité, de personnalité et d’adaptabilité. Certains vins des crus du Beaujolais sont à même de pouvoir présenter de tels profils organoleptiques. Mais soyons franc, il s’agit là d’un faible pourcentage, d’une minorité. Peut-être 10, 15 ou 20 %.
La plus grosse partie des vins produits dans le Beaujolais restera des vins simples mais parfaitement équilibrés qui ne manqueront pas de charme pour les occasions de la vie du quotidien. Simple rime avec bon et avec gamay du Beaujolais.
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