L’élargissement de l’accès aux processus de certification qui reconnaissent et valident les acquis d’apprentissage individuels en tant que qualification formelle était un élément essentiel de la réforme du secteur de l’enseignement professionnel français, qui faisait partie de la loi de modernisation sociale de 2002.
Au début des années 2000, le système éducatif français était confronté à plusieurs défis : l’augmentation massive des effectifs dans l’enseignement secondaire, la séparation de la formation initiale et de la formation continue, et la nécessité d’établir des liens plus étroits et plus authentiques entre les écoles, les entreprises et les services.
Naissance du concept de VAE
Favorisant la reconversion professionnelle, la loi de modernisation sociale a déclaré le droit de chaque individu à ce que les acquis de l’apprentissage acquis au cours d’un minimum de 3 ans d’expérience professionnelle, en tant que salarié, indépendant ou bénévole, soient reconnus et évalués par rapport à une qualification formelle. Ce droit est exercé au moyen d’un mécanisme appelé Validation des acquis de l’expérience (VAE). La spécificité de ce système qui existe en France et en Belgique est que ce droit est entièrement lié au cadre des qualifications. La VAE donne accès à toutes les qualifications répertoriées dans le Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP), qui a été lancé en 2002.
Le RNCP recense tous les diplômes ou titres professionnels qui sont accrédités par une Commission Nationale de la Certification Professionnelle (CNPC). La CNPC comprend des représentants de l’État ainsi que des partenaires sociaux et est responsable des procédures d’accréditation, quelles que soient les qualifications. Conformément aux principales intentions de la réforme, les certifications énumérées dans le RNCP sont décrites en termes d’acquis d’apprentissage par rapport à des normes de compétence.
Comment se passent les procédures et processus de VAE ?
Alors que la structure générale et l’assurance qualité des procédures de qualification et de certification sont gérées au niveau national, les questions concernant le secteur de la formation professionnelle et les procédures effectives de VAE sont décentralisées (elles sont par exemple financées par les régions). Les responsabilités et les compétences sont imbriquées : Au niveau ministériel (ministère de l’éducation), dans chaque établissement d’enseignement ou de recherche, une structure décentralisée a été lancée qui identifie les points de contact et d’orientation. La responsabilité de définir les processus et méthodologies concrets de VAE incombe ensuite à nouveau au secteur de l’enseignement supérieur et de la formation continue et à ses acteurs. Enfin, un réseau national de praticiens de la VAE contribue à l’harmonisation des pratiques.
De manière générale, le processus de VAE se décompose en cinq phases :
- La première phase comprend la consultation, l’information et l’orientation.
- La deuxième phase est celle où la demande du candidat est conforme aux règles juridiques et administratives.
- La troisième phase comprend la préparation d’un dossier de preuves, généralement avec l’aide d’un conseiller.
- La quatrième phase est celle de l’évaluation de la candidature par le jury de la VAE.
- Enfin, le jury VAE évalue la demande du candidat et lui donne un avis sur son futur parcours. D
Dans les cas où le jury demande au candidat d’approfondir son projet et d’achever le processus de certification, il suit également ses progrès.
La France autorise deux méthodes pour documenter et vérifier les compétences acquises. La principale méthode est déclarative, impliquant généralement une demande écrite dans laquelle le candidat décrit les activités qu’il met en relation avec le diplôme/certificat souhaité, en indiquant clairement l’expérience acquise. Le candidat joint tous les documents qui démontrent et prouvent cette expérience acquise : certificats de travail, exemples de réalisations professionnelles, etc. La deuxième méthode, moins courante, consiste à organiser une situation réelle ou simulée dans laquelle le candidat démontre son expérience acquise en effectuant des tâches professionnelles.
La reconnaissance des acquis de l’expérience place l’individu au centre du processus d’évaluation. Le candidat participe à un entretien avec un jury d’examen, qui juge les acquis de son expérience sur la base des normes et références de la profession et de la certification requise. Les membres du jury sont censés évaluer les compétences et les connaissances que les candidats ont acquises de manière non formelle ou informelle et vérifier qu’ils peuvent démontrer ces compétences autrement que par un examen académique.
En général, il est demandé aux candidats non seulement de décrire le travail qu’ils ont effectué, mais aussi d’expliquer comment ils ont acquis les compétences et les connaissances et quels résultats ils ont obtenus. En demandant aux candidats d’analyser leurs propres compétences, leurs schémas de pensée, les modèles qu’ils utilisent et leurs méthodologies, les examinateurs peuvent mieux comprendre si l’expérience acquise dépend étroitement du contexte dans lequel elle a été obtenue ou si elle est transférable à d’autres situations.
Sur la base de cette évaluation, le jury accorde la certification, rejette la demande ou l’accorde partiellement. Dans ce dernier cas, il doit fournir au candidat des conseils sur la manière de mettre à profit son expérience pour obtenir une certification complète, notamment en suivant des modules de formation supplémentaires. Ainsi, l’évaluation n’a pas seulement le potentiel de déboucher sur l’attribution d’une qualification, mais elle peut également orienter la progression personnelle et professionnelle des candidats et leur fournir des outils pour faciliter leur développement professionnel ultérieur.
Les impacts de la VAE
La VAE a un impact sur la conception des programmes et les approches pédagogiques. Les activités professionnelles et les compétences pratiques sont reconnues comme aussi importantes que l’acquisition de connaissances et l’apprentissage scolaire traditionnel. En outre, on prend de plus en plus conscience du fait que les activités des salariés, des indépendants, des bénévoles et des militants syndicaux sont enrichissantes, gratifiantes et peut-être équivalentes aux cadres d’apprentissage formels.
La VAE initie des démarches de reconceptualisation du système éducatif, des méthodes de certification, et remet en cause la tendance à opposer connaissances abstraites et pratiques. Au contraire, le développement personnel et professionnel implique à la fois la praxis et la théorie, qui sont en interaction constante l’une avec l’autre. Le système de transmission des connaissances et de certification s’est longtemps fondé sur une logique uniquement académique. Or, cette logique est insuffisante pour concevoir des programmes et des méthodes qui reconnaissent les activités et les compétences professionnelles, et pas seulement les connaissances académiques.
La VAE remet également en cause une hiérarchie professionnelle française très fortement fondée sur les diplômes, et ouvre la possibilité de limiter les dégâts sociaux et économiques du décrochage scolaire, ou de l’échec, par la prise en compte des acquis de l’expérience.
Enfin, la VAE est un enjeu social pour tous ceux qui n’ont pas eu la chance ou l’aptitude d’acquérir une bonne formation scolaire, en leur permettant d’acquérir une qualification reconnue sur le marché du travail.
Depuis l’introduction du système de VAE en 2002 c’est un total de 360.000 diplômes qui ont été délivrés.