Pourquoi l’apiculteur utilise t-il un enfumoir ?

L’image de l’apiculteur – un amateur ou un professionnel qui élève avec passion des milliers d’abeilles – est indissociable de sa combinaison blanche et d’un instrument très particulier, l’enfumoir. Notre imagination nous représente l’apiculteur s’activant au dessus de ses ruches, entouré par une nuée d’abeilles agacées et des volutes de fumée. Mettez-vous dans l’ambiance et poursuivez votre lecture…

Cet article se propose de présenter l’enfumoir, un outil qu’il convient de savoir employer correctement lorsqu’on s’adonne aux plaisirs de l’apiculture. Dans quelques minutes, vous saurez tout de celui-ci ! Nous vous souhaitons bonne lecture.

Qu’est ce qu’un enfumoir ?

Un enfumoir est un instrument portatif qui produit de la fumée. Il est composé de trois parties :

  • un bec
  • un réservoir
  • et un soufflet

Le bec permet de concentrer et de diriger la fumée dans une direction souhaitée. Ce bec est amovible et donne accès au réservoir, que l’on nomme parfois une chaudière ou une cuve. Le bec et le réservoir sont en métal, car ils doivent résister à de hautes températures. C’est dans le réservoir que l’apiculteur introduit du combustible, et qu’une combustion va produire de la fumée. Cette combustion demande de l’oxygène, et ce gaz présent dans l’air est introduit dans le réservoir par le soufflet. En actionnant celui-ci, l’apiculteur va pouvoir lancer et entretenir la combustion, et il pourra ensuite doser la quantité de fumée nécessaire, durant les activités réalisées sur ses ruches.

Comment allumer un enfumoir ?
Enfumoir correctement allumé. La grille qui entoure le réservoir permet d’éviter les brûlures. Source photographique : Pixabay

Les enfumoirs sont pour la plupart d’un aspect similaire et ont un fonctionnement identique. Mais il existe des enfumoirs dont le réservoir est de volume plus important. Les apiculteurs professionnels qui passent parfois plusieurs heures consécutives sur leurs ruchers pour inspecter leurs colonies, ont besoin d’enfumoir à l’autonomie conséquente. Ils choisiront des modèles avec une grosse cuve. Les enfumoirs avec un petit réservoir conviendront davantage aux apiculteurs amateurs qui possèdent seulement quelques ruches. Car la visite de l’ensemble du rucher est dans ce cas rapide.

Quelle est l’action de la fumée sur les abeilles ?

Les archéologues ont trouvé sur la paroi d’une grotte en Espagne, une peinture rupestre vieille de 9000 ans et représentant un homme qui collecte le miel d’une colonie d’abeilles sauvages. Dans d’autres régions du monde, des gravures semblables présentent en plus de la fumée employée pendant la récolte.

Peinture rupestre préhistorique représentant un homme qui récolte du miel
De gauche à droite: la peinture préhistorique figurant l’homme récoltant du miel; au centre, la reconstitution du dessin, à droite, la peinture rupestre reconstituée par la superposition du dessin sur la paroi de la grotte. Daté de 9000 avant J.-C., Grottes de l’Araignée (Cuevas de la Araña), Espagne.

Ainsi depuis des temps anciens, l’enfumage a été pratiqué pour protéger ceux qui s’intéressent de trop prêt aux abeilles et de leur miel (En savoir plus sur pourquoi et comment les abeilles font du miel). En effet, les abeilles comme la plupart des hyménoptères défendent farouchement leurs réserves laborieusement constituées. Elles sont pourvues d’un dard et elles sont capables de piquer. Mais la fumée à une action incroyable sur elles.

Cette fumée va provoquer deux phénomènes. En premier lieu, elle va alerter les abeilles et les pousser à se gorger de miel. Pas de fumée sans feu ! Ainsi les abeilles – des insectes nichant naturellement dans les arbres – n’hésitent pas à quitter leur abri en cas d’incendie. Les abeilles détectant la fumée produite par l’enfumoir vont donc se diriger vers les alvéoles où est stocké leur miel. Occupées à prendre des provisions en prévision d’une évacuation imminente, elles ne s’occuperont pas de l’apiculteur qui vient ouvrir leur ruche. Enfin la plupart des abeilles, car certaines gardiennes veillent encore.

Ce qui nous amène à la seconde action de la fumée. Ni plus ni moins, celle-ci brouille la communication chimique entre les abeilles qui protègent la colonie. L’alerte puis l’ordre d’attaquer sont donnés par l’émission de molécules volatiles que l’on nomme des phéromones. La fumée va diminuer la réceptivité des abeilles à ces substances chimiques. L’attaque sera beaucoup moins intense, et bien protégé sous son voile et sa combinaison, l’apiculteur pourra travailler en toute sécurité.

Pour en savoir davantage sur la nature et le fonctionnement des différentes phéromones, consultez notre article : « Comment les abeilles communiquent-elles ?« .

Comment allumer et éteindre l’enfumoir ?

L’enfumoir est donc un outil de sécurité, au même titre que le voile qui protège la tête de l’apiculteur. Il doit donc toujours être présent, lorsqu’il s’agit d’ouvrir une ruche et notamment durant la récolte du miel. Mais pour être efficace et calmer une colonie furieuse, il doit être correctement allumé et produire à la demande suffisamment de fumée. Enfin, son emploi n’est pas sans danger et il faut aussi prévenir tout départ d’incendie.

L’allumage de l’enfumoir

L’allumage de l’enfumoir n’est pas toujours évident pour un débutant. Bien souvent, la combustion ne prend pas. Ou bien la fumée qui sort du bec n’est pas assez abondante. Inversement, l’enfumoir peut produire une fumée trop chaude, qui pourra stresser les abeilles, et devoir quelques piqûres bien méritées à notre apiculteur maladroit. Car en plus d’être correctement allumé, l’enfumoir doit produire une fumée froide.

Pour obtenir une belle fumée, il faut un combustible de qualité souhaitée. Le foin est souvent employé, car il est facile à se procurer et son odeur lorsqu’il brûle n’est pas âpre. Mais il est aussi possible d’utiliser des aiguilles de pin bien sèches ou d’autres feuillages. Les feuilles d’Eucalyptus dégagent une fumée à l’odeur agréable. On les utilise souvent tout autour de la Méditerranée et en particulier en Afrique du Nord. Et il est aussi possible d’employer des plantes aromatiques comme le romarin ou la sauge. Ces plantes auraient des vertus calmantes sur les abeilles. Ces feuilles peuvent être utilisées en mélange et l’apiculteur en constituera une réserve suffisante. Bien entendu, des fabricants proposent aussi des granulés spécialement produits à cet usage. Ils conviennent naturellement à ceux qui ont des besoins importants.

Pour bien allumer son enfumoir, le mode d’emploi est le suivant. Du combustible est introduit dans le réservoir vide sur le tiers de sa hauteur. Il est alors allumé, en même temps que le soufflet est actionné. Une fois que des flammes apparaissent, du combustible est ajouté au fur et à mesure. Pas trop d’un coup, sinon on risque d’étouffer les braises. On remplira la cuve jusqu’à son ras, en tassant bien le combustible. Le soufflet – énergiquement sollicité – permet d’attiser la braise. Les apiculteurs professionnels utilisent parfois un chalumeau pour gagner du temps.

Lorsque la fumée dégagée est dense, on couvrira le combustible avec une poignée d’herbe verte. Celle-ci aura pour but de refroidir la fumée avant qu’elle soit expulsée par le bec. Car comme cité plus haut, les abeilles n’apprécient pas la fumée trop chaude. Puis on referme le bec de l’enfumoir. De temps en temps, on actionne le soufflet pour entretenir la combustion. Une fumée à bonne température est bien blanche. Lorsqu’elle est trop chaude, elle est bleutée. On peut se rendre compte de sa température en passant de la fumée sur la peau de son poignet.

Bien éteindre son enfumoir

L’enfumoir contient de la braise en quantité et il n’est pas prudent après usage de l’abandonner sans l’éteindre totalement. Dans de nombreuses régions et surtout au cœur de l’été, un enfumoir peut provoquer un incendie de forêt. Soyez donc prudent !

Pour l’éteindre, il suffit de boucher la sortie du bec avec une boule d’herbe fraîche. Ou toute autre matière dont on fera un bon bouchon. La fumée va se concentrer à l’intérieur de la cuve et faute d’oxygène la combustion va rapidement cesser. On peut aussi simplement coucher l’enfumoir sur le côté, pour obtenir le même effet.

Enfin, assurez-vous de ne pas vider les cendres de l’enfumoir n’importe où. Et en aucun cas dans la nature, même si vous pensez qu’il n’y a plus de braise dans la cuve. Les cendres doivent être vidées dans un sceau métallique prévu à cet effet. Vous l’avez compris, avec un enfumoir il faut être prudent.

Où puis-je apprendre à bien enfumer ?

L’apprentissage de l’apiculture passe par l’acquisition de savoirs théoriques et de gestes. Il existe en Belgique, en Suisse, en France et ailleurs dans le monde de nombreux lieux pour s’initier à l’apiculture de loisir. Ces lieux sont nommés des ruchers écoles. Vous trouverez la liste des ruchers écoles qui dispensent des enseignements en français sur la page suivante : https://apiculture.idlwt.com/formations-apiculture-en-france-belgique-suisse-canada/

L’encadrement par des apiculteurs expérimentés permet de rapidement progresser. Vous apprendrez dans un rucher école, tous les gestes nécessaires pour entretenir correctement vos ruches et veiller à la santé de vos abeilles. Bien entendu, vous aurez l’occasion de vous exercer à bien employer un enfumoir. À la lecture de cet article, nous sommes certains que vous aurez l’envie d’essayer. N’est-ce pas ?

Nous espérons que cet article vous aura intéressé et bien renseigné sur l’enfumoir, son rôle et son utilisation. Merci pour votre lecture et à bientôt.

Jean-Michel Dupuyoo
Suivez-moi

Laisser un commentaire