Histoire des pandémies

En bref

La quarantaine, cette pratique qui consiste à isoler des personnes potentiellement contagieuses, trouve ses racines dans l’Antiquité biblique. Le terme lui-même vient du vénitien « quarantena » (quarante jours), durée d’isolement imposée aux navires pendant les épidémies de peste noire au XIVe siècle. De l’empereur Justinien créant les premières zones d’exclusion à Constantinople, aux lazarets vénitiens du XVe siècle, jusqu’au confinement planétaire lors de la pandémie de COVID-19, l’histoire des quarantaines révèle comment l’humanité a tenté, avec plus ou moins de succès, de contenir la propagation des maladies mortelles en restreignant la liberté de mouvement.

Sommaire de l'article :

Le recours aux quarantaines comme protection contre la propagation des maladies existe depuis l’Antiquité. L’isolement et le confinement des personnes malades ont été les prédécesseurs de la quarantaine en tant que technique systématique.

Qu’est-ce que la quarantaine ?

Une quarantaine est une restriction de la circulation des personnes et des biens qui vise à empêcher la propagation de maladies ou de parasites. Contrairement à l’isolement médical qui concerne des personnes dont l’infection est confirmée, la quarantaine s’applique à ceux qui ont pu être exposés à une maladie transmissible sans diagnostic établi. Cette distinction peut sembler subtile, mais elle est fondamentale : isoler un malade identifié relève du soin médical, mettre en quarantaine des personnes potentiellement saines relève de la prévention collective.

Le terme est parfois confondu avec celui de cordon sanitaire. Si les deux concepts sont liés, le cordon sanitaire désigne plus spécifiquement la restriction des mouvements à l’intérieur ou à l’extérieur d’une zone géographique définie, comme une ville ou une région entière, pour empêcher qu’une infection n’en sorte ou n’y entre.

Quand a lieu la quarantaine ?
L’isolement est établi lorsque les personnes qui appartiennent au cercle rouge sont limitées dans leurs mouvements.
La quarantaine est établie lorsque les personnes appartenant au cercle jaune sont également restreintes dans leurs déplacements.

La quarantaine peut s’appliquer aux humains, mais aussi aux animaux et aux plantes, que ce soit dans le cadre du contrôle des frontières ou à l’intérieur d’un pays. Cette universalité témoigne d’une réalité simple : les maladies ne connaissent pas de frontières, et leur prévention nécessite parfois des mesures drastiques qui transcendent les espèces.

D’où vient le mot quarantaine ?

Imaginez un marin vénitien du XIVe siècle, après des mois en mer, apercevant enfin les clochers familiers de sa ville. Mais au lieu d’accoster et de retrouver sa famille, son navire doit mouiller sur une île déserte pendant quarante jours entiers. Quarante jours à contempler son foyer sans pouvoir y retourner, quarante jours d’attente anxieuse à espérer que ni lui ni ses compagnons ne développent les bubons mortels de la peste noire. Cette attente interminable, les Vénitiens l’ont appelée quarantena, littéralement « quarante jours » dans leur dialecte.

Le mot vient précisément de quarantena, une variante de l’italien quaranta giorni utilisée dans le dialecte vénitien des XIVe et XVe siècles. Cette période faisait suite au trentino, un isolement de trente jours imposé pour la première fois en 1377 à Raguse, ville sous domination vénitienne. Pourquoi rallonger de trente à quarante jours ? Les autorités avaient observé que la peste bubonique se déroulait sur environ 37 jours entre l’infection et la mort. En imposant quarante jours d’isolement, ils s’assuraient avec une marge de sécurité que toute personne infectée manifesterait ses symptômes avant de contaminer la population. Une intuition médicale remarquable pour une époque où l’on ignorait tout des bactéries.

En français, le mot quarantaine suit une évolution sémantique intéressante. Il est attesté dès 1180 pour signifier simplement « espace de quarante jours », notamment en référence à la période du carême. Ce n’est qu’en 1635 que le mot acquiert sa définition moderne liée à l’isolement sanitaire des individus, témoignant de l’adoption progressive par la France des pratiques italiennes de santé publique.

Les premières tentatives d’isolement dans l’Histoire

Des recommandations bibliques aux intuitions anciennes

La toute première mention d’un isolement à visée sanitaire se trouve dans un texte surprenant : le livre biblique du Lévitique, rédigé au VIIe siècle avant notre ère, peut-être même plus tôt. Ce texte décrit avec une précision étonnante la procédure de séparation des personnes infectées pour empêcher la propagation de la maladie, très probablement la lèpre causée par la bactérie Mycobacterium leprae.

Le protocole décrit dans le treizième chapitre du Lévitique possède une rigueur quasi médicale :

Si la tache brillante sur la peau est blanche mais ne semble pas plus profonde que la peau et que le poil n’est pas devenu blanc, le prêtre doit isoler la personne affectée pendant sept jours. Le septième jour, le prêtre doit l’examiner et s’il constate que la plaie n’a pas changé et ne s’est pas étendue à la peau, il doit l’isoler pendant sept jours supplémentaires.

Cette approche en deux temps de sept jours révèle une compréhension empirique de l’évolution des maladies de peau. Cependant, le texte biblique mêle ces observations pratiques à des rituels religieux, avec des offrandes et des sacrifices d’agneau censés guérir le patient. Les rabbins de l’époque plaçaient leur confiance dans le fait que Dieu guérirait les affligés et protégerait les non infectés. Ces méthodes, bien qu’elles comportent un élément d’isolement, ne constituent pas encore une véritable quarantaine au sens moderne : il s’agit davantage d’une exclusion religieuse que d’une mesure de santé publique systématique.

La peste de Justinien : la première quarantaine de l’Histoire

Près d’un millier d’années plus tard, en 541 de notre ère, une catastrophe sanitaire d’une ampleur inédite frappe le monde méditerranéen. Originaire d’Arabie et de Péluse en Égypte, la peste bubonique déferle sur la Syrie, la Perse et la Palestine. Les symptômes sont terrifiants : des poussées soudaines de fièvre, un effondrement physique brutal, l’apparition de bubons noirs et gonflés, du délire, des vomissements de sang, puis la mort. Cette épidémie prend rapidement les caractéristiques d’une pandémie en franchissant toutes les frontières connues.

En 542, la maladie atteint Constantinople, capitale de l’Empire byzantin, joyau architectural et centre névralgique du pouvoir impérial. Selon l’historien Procope de Césarée, témoin direct des événements, la peste tue jusqu’à 10 000 personnes par jour dans la ville. Un chiffre vertigineux qui représente l’anéantissement de 40% de la population de la capitale. Les rues se remplissent de cadavres plus vite qu’on ne peut les évacuer. L’odeur de la mort imprègne chaque quartier.

L’empereur Justinien lui-même contracte la peste, mais contrairement à tant d’autres, il survit et développe une immunité. Cette expérience personnelle de la maladie le confronte à l’ampleur du désastre. Réalisant que l’accumulation des corps constitue elle-même un danger sanitaire, il met rapidement en place des procédures d’évacuation. Des fonds publics sont alloués pour payer des fossoyeurs, et des navires sont employés pour jeter les corps en mer, loin de la ville.

Mais Justinien va plus loin. Cherchant des coupables à cette catastrophe incompréhensible, il promulgue une série de lois visant les populations qu’il considère comme responsables de l’épidémie : les Juifs et leur régime casher, les Samaritains, les païens, les hérétiques, les Ariens, les Montanistes et les homosexuels. Ces lois créent une forme de mise en quarantaine stigmatisante autour de Constantinople, interdisant à ces groupes de circuler librement dans la capitale.

Il faut préciser que cette quarantaine discriminatoire était du reste très poreuse et largement inefficace. Les minorités visées n’étaient évidemment pas plus porteuses de la peste que les chrétiens orthodoxes qui mouraient en masse. Le racisme et l’intolérance religieuse du règne de Justinien ont joué un rôle majeur dans leur désignation comme boucs émissaires. La quarantaine décrétée par Justinien s’est avérée pratiquement inutile et n’a rien fait pour arrêter la propagation de la peste. Il s’agit néanmoins de la première mise en quarantaine notable et documentée de l’Histoire, établissant un précédent funeste : celui d’utiliser les mesures sanitaires comme prétexte à la persécution.

Les quarantaines dans le monde musulman

La pratique de la quarantaine hospitalière obligatoire trouve un développement précoce et remarquable dans le monde islamique. Entre 706 et 707, le sixième calife omeyyade Al-Walid Ier fait construire le premier hôpital à Damas, innovation architecturale et médicale majeure pour l’époque. Dans cet établissement, il donne l’ordre explicite d’isoler les personnes infectées par la lèpre des autres patients. Cette séparation représente une avancée conceptuelle importante : reconnaître que certaines maladies nécessitent un isolement même au sein d’un établissement de soins.

Cette pratique de quarantaine médicale pour les lépreux dans les hôpitaux généraux se perpétue pendant plus de sept siècles dans le monde musulman. Ce n’est qu’en 1431 que les Ottomans franchissent une nouvelle étape en construisant un hôpital entièrement dédié aux lépreux à Edirne (l’ancienne Adrianople). Cette spécialisation marque la reconnaissance que certaines maladies chroniques et contagieuses nécessitent des structures permanentes et spécialisées, préfigurant les sanatoriums modernes.

Le Moyen Âge et l’invention de la quarantaine moderne

Philippe V et l’exclusion des lépreux en 1321

La lèpre hante l’imaginaire médiéval européen. Dans les villes et villages, la silhouette des lépreux avec leur crécelle pour avertir de leur approche fait partie du paysage quotidien. En 1321, le roi de France Philippe V décide de systématiser leur exclusion en promulguant une ordonnance royale établissant des mesures sanitaires de quarantaine pour séparer socialement les lépreux de la population saine.

Cette ordonnance ne crée pas la ségrégation des lépreux – elle existait déjà – mais elle la codifie juridiquement et la rend obligatoire sur tout le territoire royal. De nombreuses villes abritent déjà des léproseries, établissements situés systématiquement à l’écart des centres urbains, souvent à une distance suffisante pour que les malades ne puissent contaminer les puits ou les sources d’eau. Ces lieux d’isolement forcé sont à la fois des refuges et des prisons, offrant aux lépreux un toit et de la nourriture, mais les coupant définitivement de leur vie antérieure.

1347-1352 : quand la peste noire terrasse l’Europe

Entre 1347 et 1352, l’Europe connaît la plus grande catastrophe démographique de son histoire. La peste noire anéantit environ 30% de la population européenne et un pourcentage significatif de la population asiatique. Des villes entières sont décimées. Des villages sont abandonnés, leurs habitants tous morts ou ayant fui. Les survivants errent dans un monde dépeuplé où les cadavres s’accumulent plus vite qu’on ne peut les enterrer.

Cette pandémie d’une ampleur sans précédent contraint les gouvernements à repenser entièrement leur approche de la santé publique. Les prières et les processions religieuses se révèlent impuissantes face à la progression inexorable de la maladie. Il faut trouver des solutions pratiques, même si l’on ignore tout de la nature véritable du fléau.

En 1377, un document officiel de la ville-état de Raguse (l’actuelle Dubrovnik en Croatie) établit une mesure révolutionnaire : avant d’entrer dans la ville, tous les nouveaux arrivants doivent passer trente jours, une trentine, dans un lieu restreint, généralement sur des îles voisines. Pendant cette période d’attente, on observe si les symptômes de la peste noire se développent chez les voyageurs. Si au bout de trente jours ils demeurent en bonne santé, ils peuvent enfin entrer dans la cité.

Cette innovation se répand rapidement dans les cités italiennes, mais avec une modification cruciale. En 1448, le sénat vénitien, s’appuyant sur des observations plus précises de l’évolution de la maladie, prolonge la période d’attente à 40 jours. Cette décision donne naissance au terme quarantaine. Pourquoi quarante et non trente ? Les médecins vénitiens avaient remarqué que certains cas de peste se déclaraient après le trentième jour d’exposition. Les estimations modernes confirment leur intuition : la peste bubonique se déroule sur une période d’environ 37 jours entre l’infection et la mort. La quarantaine de quarante jours offrait donc une marge de sécurité suffisante pour identifier pratiquement tous les cas.

Comment se transmet une maladie ?
La séquence des événements au cours d’une maladie simple, directement transmise.
La dynamique de la maladie est représentée dans A et la dynamique de linfectiosité dans B.
Les victimes peuvent cesser d’être infectieuses avant la fin de la période symptomatique.

Cette formule des quarante jours s’avère remarquablement efficace. Les équipages des navires de commerce et de ravitaillement sont systématiquement soumis à cette attente avant de pouvoir décharger leurs marchandises et débarquer. Si un marin développe la peste pendant ces quarante jours, le navire tout entier reste en quarantaine jusqu’à ce que quarante nouveaux jours se soient écoulés depuis le dernier cas déclaré.

La peste n’est cependant pas la seule maladie à susciter des mesures de quarantaine. La lèpre continue de justifier l’isolement à long terme des malades, parfois leur vie durant. Après 1492, lorsque la syphilis apparaît en Europe, probablement rapportée du Nouveau Monde, des tentatives sont faites dans le nord de l’Europe pour enrayer sa propagation par des mesures d’isolement. D’autres villes italiennes, comme Modène en 1374, expérimentent diverses mesures préventives.

L’apparition des lazarets au XVe siècle

Venise franchit une étape supplémentaire dans l’organisation de la quarantaine en fondant le premier lazaret en 1403 sur une petite île adjacente à la cité. Un lazaret est un établissement spécifiquement conçu pour la mise en quarantaine des équipages, des passagers et des marchandises provenant de ports touchés par la peste. Le terme lazaret vient lui-même de Lazare, le saint patron des lépreux, soulignant le lien entre ces nouvelles installations et les anciennes léproseries.

Lazzaretto Vecchio
Lazzaretto Vecchio, l’ancien lazaret de Venise.

Ces lazarets représentent bien plus qu’une simple amélioration logistique. Ils témoignent d’une approche systématique et institutionnalisée de la santé publique. Au lieu de laisser les navires en quarantaine errer au large ou s’ancrer sur des îles désertes, les autorités créent des infrastructures permanentes avec des bâtiments pour héberger les voyageurs, des entrepôts pour stocker les marchandises, et du personnel dédié à la surveillance sanitaire.

Le modèle vénitien inspire rapidement d’autres grandes cités portuaires. En 1467, Gênes suit l’exemple et établit son propre lazaret. En 1476, Marseille transforme son ancien hôpital des lépreux, devenu moins nécessaire avec le déclin de la lèpre en Europe, en hôpital de la peste. Ce recyclage d’infrastructure illustre bien l’évolution des priorités sanitaires : la lèpre, terreur du Moyen Âge central, cède la place à la peste comme principal fléau à contenir.

Le grand lazaret de Marseille, peut-être le plus complet de son genre, est fondé en 1526 sur l’île de Pomègues. Ce complexe impressionnant dispose de vastes bâtiments, de cours d’aération, de fontaines pour se laver, et d’un système de rotation permettant d’isoler différents groupes de voyageurs selon leur port de provenance et leur date d’arrivée. La pratique dans tous les lazarets de la Méditerranée suit des procédures similaires, adaptées de celle utilisée par l’Angleterre dans le commerce levantin et nord-africain.

Lorsque le choléra arrive en Europe en 1831, apportant une nouvelle menace épidémique, de nouveaux lazarets sont rapidement installés dans les ports occidentaux. Un établissement particulièrement étendu est construit près de Bordeaux pour contrôler les arrivées par l’Atlantique. Ces installations témoignent de la pérennité du concept de lazaret, adaptable à différentes maladies infectieuses au fil des siècles.

1666 : le sacrifice héroïque du village d’Eyam

En Angleterre, la peste noire ne disparaît pas avec le Moyen Âge. Elle persiste et tourmente les populations pendant plusieurs centaines d’années, resurgissant par vagues successives. Les grandes villes anglaises sont particulièrement vulnérables : Londres, avec ses conditions sanitaires déplorables et sa surpopulation massive, offre un terrain idéal aux épidémies. En 1665, la Grande Peste de Londres tue entre 75 000 et 100 000 habitants de la capitale, soit environ un cinquième de sa population.

L’année suivante, en 1666, un événement extraordinaire se produit dans le petit village d’Eyam, niché dans la campagne du Derbyshire, à 260 kilomètres au nord de Londres. Lorsque les premiers villageois commencent à mourir d’une maladie mystérieuse, le recteur du village, William Mompesson, prend une décision qui entrera dans l’histoire : il propose aux habitants de s’imposer volontairement une quarantaine totale.

Imaginez la scène : fin mai ou début juin 1666, Mompesson rassemble les villageois et leur expose son plan. Pour empêcher la maladie de se propager aux villages voisins, Eyam doit se couper du monde. D’un commun accord, dans un acte de courage collectif remarquable, les citoyens acceptent de se limiter à un rayon d’environ 800 mètres autour du village. Personne ne doit en sortir, personne ne doit y entrer.

Les villes voisines et divers seigneurs locaux organisent un système d’approvisionnement : de la nourriture et d’autres fournitures sont déposées en plusieurs points prédéterminés à la limite du village. Les villageois viennent les récupérer sans contact direct avec les livreurs. Pour payer, ils laissent des pièces de monnaie dans des vasques remplies de vinaigre, censé désinfecter l’argent.

Cette quarantaine volontaire va durer plus d’un an. Pendant ces mois terribles, les villageois voient leurs proches mourir les uns après les autres. Selon le registre paroissial d’Eyam, 260 personnes périssent. Les estimations de la population totale de la communauté se situent entre 688 et 800 habitants, ce qui signifie que l’épidémie tue entre 33 et 38% de la population du village. Certaines familles sont entièrement décimées. Le courage de William Mompesson est d’autant plus remarquable que sa propre femme succombe à la maladie.

Mais le sacrifice d’Eyam n’est pas vain. La quarantaine empêche effectivement la maladie de se propager aux villages environnants. Pas un seul cas n’est signalé au-delà du périmètre établi. Cette réussite soulève cependant des questions médicales intéressantes. Le rythme auquel les gens mouraient était en réalité bien trop rapide pour correspondre au temps d’incubation habituel de la peste bubonique. De plus, l’emplacement isolé d’Eyam et le type d’habitations du village auraient dû empêcher la propagation des rats et puces nécessaires à la transmission de la peste bubonique classique. Enfin, certains symptômes décrits, notamment une possible nécrose des organes internes, ne correspondent pas parfaitement aux descriptions traditionnelles de la peste.

Si la maladie avait bien été la peste bubonique transmise par les rats, la quarantaine des humains n’aurait eu aucun effet sur la population de rongeurs, libre de migrer vers les villages voisins. Le fait que la quarantaine ait fonctionné suggère que la transmission était directement interhumaine, ce qui correspondrait davantage à une forme de peste pneumonique ou à une maladie différente. Cette énigme médicale ne diminue en rien le courage des habitants d’Eyam, mais elle illustre les limites des connaissances médicales de l’époque et la part de chance dans le succès de certaines mesures sanitaires. Cette quarantaine est vue comme une réussite historique.

L’ère moderne : vers une standardisation internationale des quarantaines

Les conventions sanitaires internationales (1852-1927)

Au milieu du XIXe siècle, les grandes puissances européennes prennent conscience qu’une approche coordonnée des quarantaines s’impose. Les navires à vapeur raccourcissent les distances, le commerce international s’intensifie, et les épidémies peuvent désormais traverser les océans en quelques semaines. Depuis 1852, plusieurs conférences internationales sont organisées avec le concours des puissances européennes, en vue d’une action uniforme pour empêcher l’infection en provenance de l’Est et prévenir sa propagation en Europe.

Toutes ces conférences, sauf celle de 1897, sont consacrées au choléra, cette terrible maladie qui déferle par vagues depuis l’Inde et décime les populations européennes. Les premières conférences de Paris (1852), Constantinople (1866), Vienne (1874) et Rome (1885) n’aboutissent à aucun résultat concret, paralysées par les rivalités politiques et les divergences scientifiques. Mais chacune des conférences suivantes adopte une doctrine d’infection de plus en plus constructive. L’objectif de chaque convention sanitaire internationale est de contraindre les gouvernements à un minimum uniforme d’action préventive, tout en autorisant chaque pays à imposer des restrictions supplémentaires selon ses besoins.

Le minimum fixé par les conventions internationales s’inspire largement de la pratique britannique, qui avait été à son tour adaptée à l’opinion continentale en matière d’importation de chiffons (vecteur connu de transmission de maladies). L’un des premiers points cruciaux à traiter lors de la convention de 1897 concerne la période d’incubation de la peste, et la période à adopter à des fins administratives. Après de longues discussions scientifiques, il est admis que la période d’incubation est, en règle générale, relativement courte, d’environ trois ou quatre jours. Pourtant, pour des raisons de sécurité et pour tenir compte des cas exceptionnels, dix jours sont acceptés à une très large majorité comme durée standard de quarantaine pour la peste.

Le principe de la notification des maladies est adopté à l’unanimité, marquant une avancée majeure dans la coopération sanitaire internationale. Chaque gouvernement s’engage à notifier aux autres gouvernements l’existence de la peste sur son territoire, tout en précisant les mesures de prévention prises pour empêcher sa diffusion. La zone considérée comme infectée est limitée au district ou au village où la maladie prévaut effectivement. Une localité n’est plus considérée comme infectée du seul fait de l’importation de quelques cas de peste tant qu’il n’y a pas eu de diffusion locale de la maladie.

En ce qui concerne les précautions à prendre aux frontières terrestres, il est décidé que pendant la prévalence de la peste, chaque pays conserve le droit inhérent de fermer ses frontières terrestres contre la circulation. Cette clause reflète la tension permanente entre les impératifs de santé publique et les intérêts du commerce international.

Pour la mer Rouge et le canal de Suez, artère vitale du commerce entre l’Europe et l’Asie, des règles spécifiques sont établies après de longues négociations. Un navire sain peut passer par le canal de Suez et poursuivre son voyage en Méditerranée pendant la période d’incubation de la maladie dont la prévention est en question. Les navires en quarantaine peuvent, sous réserve de l’utilisation de l’éclairage électrique, embarquer du charbon à Port-Saïd de nuit comme de jour, et les passagers peuvent embarquer en quarantaine dans ce port. Les navires infectés, s’ils ont à leur bord un médecin et sont équipés d’un poêle désinfectant, ont le droit de naviguer sur le canal en quarantaine, sous réserve uniquement du débarquement de ceux qui souffrent de la peste.

Ces conventions internationales posent les jalons d’une gouvernance sanitaire mondiale, préfigurant la création de l’Organisation mondiale de la santé au XXe siècle. Elles témoignent de la reconnaissance progressive que les épidémies constituent une menace transnationale nécessitant une réponse coordonnée.

Du cordon sanitaire au confinement planétaire : la pandémie de COVID-19

Le précédent chinois de Wuhan

Lors de l’épidémie de coronavirus en 2019-2020, un cordon sanitaire d’une ampleur sans précédent dans l’histoire de l’humanité est imposé à Wuhan, berceau de l’épidémie, et à d’autres grandes villes de Chine, touchant environ 500 millions de personnes. Le confinement de Wuhan, et par la suite la mise en quarantaine à plus grande échelle dans toute la province du Hubei, commence le 23 janvier 2020. À ce stade, la propagation du virus en Chine continentale se fait à un rythme d’environ 50% de cas supplémentaires par jour. Le 8 février, le taux de propagation journalier tombe en dessous de 10%. Au 19 mars 2020, aucun nouveau cas de coronavirus n’est détecté en Chine.

Expansion du coronavirus COVID-19
Expansion du coronavirus COVID-19

L’Italie et la généralisation européenne des quarantaines

Le 22 février 2020, un cordon sanitaire est imposé à un groupe d’au moins 10 municipalités différentes du nord de l’Italie, mettant en quarantaine plus de 50 000 personnes. Cette décision fait suite à deux jours où les cas détectés font un bond énorme (la période du 21 au 23 février voit des augmentations quotidiennes de 567%, 295% et 90% respectivement). Une semaine plus tard, le taux d’augmentation des cas en Italie est considérablement réduit (la période du 29 février au 4 mars voit des augmentations quotidiennes de 27%, 50%, 20%, 23% et 23%).

Le 8 mars 2020, une région beaucoup plus vaste du nord de l’Italie est placée sous restriction de quarantaine, impliquant environ 16 millions de personnes. Le lendemain, la quarantaine est étendue à l’ensemble de l’Italie, avec effet au 10 mars 2020, plaçant environ 60 millions de personnes en quarantaine. C’est la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale qu’un pays européen entier est soumis à une telle restriction de mouvement.

De nombreux autres pays emboîtent rapidement le pas de l’Italie et de la Chine. La France, la Belgique, l’Espagne, puis progressivement presque tous les pays du monde instaurent des confinements de leurs populations, limitant au minimum les interactions sociales et ne permettant l’ouverture que des commerces alimentaires et des services essentiels. Des mesures de distanciation sociale sont appliquées partout dans le monde pour freiner la transmission du virus lors des interactions sociales entre les individus.

Le bilan historique de la pandémie de COVID-19

Avec le recul de cinq années depuis le début de la pandémie, nous pouvons aujourd’hui dresser un bilan plus complet de cette crise sanitaire mondiale. La pandémie de COVID-19 a causé officiellement plus de 7 millions de morts dans le monde, bien que les estimations de l’Organisation mondiale de la santé suggèrent que le bilan réel pourrait être deux à trois fois supérieur en raison des décès non comptabilisés, particulièrement dans les pays en développement.

Les quarantaines et confinements de 2020-2021 ont représenté la plus grande restriction de liberté de mouvement jamais imposée à l’humanité. À leur apogée, plus de 4 milliards de personnes, soit plus de la moitié de la population mondiale, étaient soumises à une forme ou une autre de confinement. L’impact économique a été considérable, avec une récession mondiale comparable à celle de 1929, et des répercussions sociales profondes sur la santé mentale, l’éducation et les inégalités.

Les débats sur l’efficacité relative des différentes stratégies de quarantaine restent vifs. Certains pays comme la Nouvelle-Zélande et l’Australie ont opté pour des confinements stricts et des fermetures de frontières drastiques, parvenant à éliminer temporairement le virus de leur territoire. D’autres, comme la Suède, ont choisi des approches plus permissives basées sur la responsabilité individuelle. La rapidité sans précédent du développement des vaccins, avec les premiers vaccins autorisés en moins d’un an, a finalement offert une alternative aux quarantaines prolongées.

Cette pandémie a également révélé les limites des quarantaines à l’ère de la mondialisation. Contrairement aux époques précédentes où les quarantaines portuaires suffisaient, la vitesse des déplacements aériens modernes a permis au virus de se répandre sur tous les continents en quelques semaines seulement. Elle a également mis en lumière les tensions entre libertés individuelles et sécurité sanitaire collective, ravivant des débats philosophiques et politiques qui remontent aux premières quarantaines de l’histoire.

Conclusion : les leçons de l’histoire des quarantaines

En parcourant plus de deux millénaires d’histoire des quarantaines, de l’isolement biblique des lépreux aux confinements planétaires du COVID-19, plusieurs constantes remarquables se dégagent. D’abord, l’intuition humaine a souvent précédé la compréhension scientifique : les Vénitiens du XIVe siècle avaient identifié empiriquement la bonne durée d’isolement pour la peste, sept siècles avant la découverte de la bactérie responsable. Cette capacité d’observation et d’adaptation face à l’invisible témoigne d’une forme de sagesse pratique qui a sauvé d’innombrables vies.

L’histoire révèle également que les quarantaines ont toujours été à la fois des mesures sanitaires et des instruments politiques. De Justinien persécutant les minorités à Constantinople aux débats contemporains sur les passeports vaccinaux, la santé publique se trouve invariablement à l’intersection de la science, du pouvoir et de l’éthique. Les quarantaines efficaces, comme celle d’Eyam en 1666 ou les lazarets vénitiens, reposaient sur un contrat social : l’acceptation collective d’un sacrifice individuel pour le bien commun. Lorsque ce contrat se brise, soit par injustice comme sous Justinien, soit par perte de confiance comme lors de certains confinements du COVID-19, l’efficacité des mesures s’effondre.

Une autre leçon fondamentale concerne l’évolution des menaces et des réponses. Chaque époque a dû adapter le concept de quarantaine à ses propres défis : les cités médiévales ont créé les lazarets pour les navires, le XIXe siècle a établi des conventions internationales pour le commerce mondial, et le XXIe siècle a dû inventer le télétravail de masse et les applications de traçage numérique. Cette plasticité du concept témoigne de sa pertinence durable, mais aussi de la nécessité constante de l’innovation.

L’histoire montre également les limites des quarantaines. Elles fonctionnent mieux contre les maladies à période d’incubation bien définie et à transmission clairement identifiée. Elles sont plus difficiles à maintenir sur de longues durées, comme l’ont démontré les multiples échecs de confinement durant la pandémie de COVID-19. Et elles comportent toujours un coût humain considérable : économique, social et psychologique.

Paradoxalement, alors que notre compréhension scientifique des maladies infectieuses n’a jamais été aussi sophistiquée, avec la génomique, l’épidémiologie moléculaire et la modélisation informatique, nous continuons de recourir à la plus ancienne des stratégies de santé publique : séparer les malades des bien-portants, isoler les populations exposées. Cette continuité suggère que malgré tous nos progrès technologiques, les lois fondamentales de la transmission des maladies infectieuses demeurent inchangées.

Enfin, l’histoire des quarantaines nous rappelle que les crises sanitaires sont des moments de vérité pour les sociétés. Elles révèlent les solidarités profondes comme les fractures sociales. Les héros d’Eyam acceptant de mourir pour sauver leurs voisins, les médecins des lazarets risquant leur vie pour soigner les pestiférés, ou les soignants contemporains durant la pandémie de COVID-19 incarnent le meilleur de l’humanité. À l’inverse, les persécutions de Justinien, les quarantaines discriminatoires basées sur la race ou la classe sociale, et les théories du complot contemporaines illustrent comment la peur peut corrompre les mesures de santé publique.

Alors que de nouvelles pandémies surviendront inévitablement, l’histoire des quarantaines nous enseigne que la préparation technique ne suffit pas. Nous devons également cultiver la confiance sociale, l’équité dans l’application des mesures, la transparence de la communication scientifique, et surtout, la mémoire collective de nos succès et échecs passés. Car comme l’a prouvé William Mompesson à Eyam il y a plus de trois siècles, la plus efficace des quarantaines est celle que les gens choisissent librement d’observer, parce qu’ils comprennent sa nécessité et font confiance à ceux qui la proposent.

Questions fréquentes sur l’histoire des quarantaines

Pourquoi la quarantaine dure-t-elle 40 jours et non un autre nombre ?

La durée de 40 jours a été établie par Venise en 1448, après observation que la peste bubonique se déroulait sur environ 37 jours entre l’infection et la mort. Les trois jours supplémentaires offraient une marge de sécurité. Cette période s’est avérée suffisamment longue pour identifier pratiquement tous les cas potentiels, d’où son adoption généralisée. Auparavant, Raguse avait instauré une trentine (30 jours), mais celle-ci s’est révélée parfois insuffisante.

Quelle est la différence entre quarantaine et isolement ?

L’isolement concerne des personnes dont l’infection par une maladie transmissible est confirmée par diagnostic médical, qui sont séparées de la population saine pour éviter la transmission. La quarantaine s’applique à des personnes qui ont pu être exposées à une maladie mais dont l’infection n’est pas confirmée. En quarantaine, on observe si des symptômes se développent pendant la période d’incubation présumée de la maladie.

Quelle est la première quarantaine documentée de l’histoire ?

La première mise en quarantaine notable et documentée remonte à 542 après J.-C., lorsque l’empereur Justinien a créé des zones d’exclusion à Constantinople pendant la peste de Justinien. Cependant, cette quarantaine était discriminatoire, ciblant des minorités religieuses et ethniques comme boucs émissaires, et s’est avérée largement inefficace. La première quarantaine systématique et efficace date de 1377 à Raguse (Dubrovnik), avec une période d’isolement de 30 jours pour les voyageurs.

Les quarantaines étaient-elles vraiment efficaces contre la peste au Moyen Âge ?

Oui, les quarantaines de 40 jours instaurées par Venise et d’autres cités italiennes se sont révélées remarquablement efficaces. La période d’incubation de la peste bubonique correspond presque exactement à cette durée, permettant d’identifier les cas avant qu’ils n’entrent dans les villes. Cependant, leur efficacité dépendait d’une application stricte, ce qui n’était pas toujours le cas. Les lazarets, établissements dédiés à la quarantaine, ont grandement amélioré l’efficacité de ces mesures.

Qu’est-ce qu’un lazaret ?

Un lazaret est un établissement créé spécifiquement pour mettre en quarantaine les équipages, passagers et marchandises provenant de ports touchés par la peste ou d’autres maladies contagieuses. Le premier a été fondé par Venise en 1403 sur une île adjacente à la cité. Le terme vient de Lazare, saint patron des lépreux. Ces installations comportaient des bâtiments d’hébergement, des entrepôts, et du personnel médical dédié, constituant la première infrastructure permanente de santé publique préventive.

Pourquoi le village d’Eyam est-il célèbre dans l’histoire des quarantaines ?

En 1666, le village anglais d’Eyam s’est imposé volontairement une quarantaine totale pour empêcher une épidémie mortelle de se propager aux villages voisins. Sous la direction du recteur William Mompesson, les 688 à 800 habitants ont accepté de ne pas quitter un rayon de 800 mètres pendant plus d’un an. 260 personnes sont mortes (33 à 38% de la population), mais aucun cas ne s’est déclaré dans les villages environnants. C’est l’exemple le plus célèbre de sacrifice collectif volontaire pour le bien commun.

Comment les conventions internationales ont-elles standardisé les quarantaines ?

Entre 1852 et 1927, plusieurs conférences internationales ont été organisées, principalement autour du choléra. La convention de 1897 a été particulièrement importante, établissant une période de quarantaine standard de 10 jours pour la peste (bien que sa période d’incubation soit plus courte), et instaurant l’obligation pour chaque pays de notifier les autres de l’existence d’épidémies sur son territoire. Ces conventions ont posé les bases d’une gouvernance sanitaire mondiale, préfigurant l’Organisation mondiale de la santé.

Les quarantaines ont-elles toujours été justes et équitables ?

Non, l’histoire montre de nombreux exemples de quarantaines discriminatoires et injustes. Justinien a utilisé la quarantaine pour persécuter les minorités religieuses et ethniques à Constantinople. Les quarantaines ont souvent été appliquées de manière plus stricte aux pauvres qu’aux riches, et certaines ont servi de prétexte au racisme, comme lors des épidémies de choléra au XIXe siècle où les immigrants étaient particulièrement ciblés. Cette instrumentalisation politique des mesures sanitaires est une constante historique préoccupante.

Combien de personnes ont été mises en quarantaine lors de la pandémie de COVID-19 ?

La pandémie de COVID-19 a vu les quarantaines les plus massives de l’histoire humaine. À leur apogée en mars-avril 2020, plus de 4 milliards de personnes (plus de la moitié de l’humanité) étaient soumises à une forme ou une autre de confinement ou de restriction de mouvement. Le premier grand confinement a touché environ 500 millions de personnes en Chine (province du Hubei et autres régions), suivi par l’Italie (60 millions), puis progressivement presque tous les pays du monde.

Pourquoi les quarantaines du COVID-19 ont-elles été si controversées ?

Contrairement aux quarantaines historiques qui visaient principalement les voyageurs et les malades identifiés, les confinements du COVID-19 ont restreint l’ensemble de la population, y compris les personnes saines. L’impact économique et social a été considérable, touchant l’éducation, la santé mentale, et creusant les inégalités. Les débats ont porté sur l’équilibre entre libertés individuelles et sécurité sanitaire collective, l’efficacité comparative des différentes stratégies (stricte vs. permissive), et la durée appropriée de telles mesures. Le manque de précédent historique à cette échelle a compliqué les décisions.

Les quarantaines fonctionnent-elles mieux pour certaines maladies que pour d’autres ?

Oui, les quarantaines sont plus efficaces contre les maladies avec une période d’incubation bien définie et des symptômes clairement identifiables, comme la peste bubonique ou Ebola. Elles sont moins efficaces contre les maladies à transmission asymptomatique importante (comme le COVID-19), à longue période d’incubation variable, ou à transmission par vecteurs non humains (comme les moustiques pour le paludisme). La clarté du mode de transmission est également cruciale : les quarantaines médiévales contre la peste auraient été inutiles si l’on avait su qu’elle était transmise par les puces de rats.

Qu’est-ce qu’un cordon sanitaire et en quoi diffère-t-il d’une quarantaine ?

Un cordon sanitaire est la restriction des mouvements des personnes à l’intérieur ou à l’extérieur d’une zone géographique définie (ville, région, pays) pour empêcher la propagation d’une infection. Il diffère de la quarantaine individuelle par son échelle territoriale. Le confinement de Wuhan en 2020 était un cordon sanitaire. Historiquement, les cordons sanitaires ont été utilisés lors d’épidémies de fièvre jaune, de choléra, et de peste. Leur efficacité dépend de la capacité à contrôler réellement tous les points d’entrée et de sortie de la zone concernée.

Le monde musulman a-t-il contribué au développement des quarantaines ?

Oui, de manière significative. Entre 706 et 707, le calife Al-Walid Ier a construit le premier hôpital à Damas avec l’ordre explicite d’isoler les lépreux des autres patients, établissant le principe de quarantaine hospitalière. Cette pratique s’est perpétuée pendant sept siècles dans le monde musulman jusqu’à la construction en 1431 d’un hôpital entièrement dédié aux lépreux à Edirne par les Ottomans. Ces innovations ont influencé les pratiques médicales européennes, notamment à travers les échanges en Méditerranée.

Les animaux et les plantes peuvent-ils être mis en quarantaine ?

Oui, absolument. La quarantaine s’applique aux animaux pour prévenir la propagation de maladies comme la rage, la fièvre aphteuse, ou la grippe aviaire. Les animaux importés doivent souvent passer des semaines ou mois en quarantaine avant d’entrer dans certains pays. Les plantes sont également soumises à quarantaine pour éviter l’introduction de parasites, champignons ou insectes nuisibles. L’Australie et la Nouvelle-Zélande, en raison de leur isolement géographique et de leurs écosystèmes uniques, appliquent des quarantaines particulièrement strictes pour les animaux et les végétaux.

Quelles sont les alternatives modernes à la quarantaine traditionnelle ?

Les alternatives et compléments modernes incluent la vaccination préventive (rendant parfois la quarantaine inutile), le traçage numérique des contacts via applications mobiles, les tests de dépistage rapides permettant d’identifier rapidement les cas, la quarantaine à domicile avec surveillance électronique, les traitements antiviraux précoces réduisant la période de contagiosité, et la surveillance épidémiologique en temps réel. Cependant, même avec ces technologies, la séparation physique des personnes contagieuses reste le principe fondamental, démontrant la pertinence durable du concept ancestral de quarantaine.

Sam Zylberberg

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